Přehled

Text rozhodnutí
Datum rozhodnutí
2.2.2023
Rozhodovací formace
Významnost
3
Číslo stížnosti / sp. zn.

Rozhodnutí

QUATRIÈME SECTION

DÉCISION

Requête no 21299/19
Janos CSIZMADIA contre la Roumanie
et 2 autres requêtes
(voir tableau en annexe)

La Cour européenne des droits de l’homme (quatrième section), siégeant le 2 février 2023 en un comité composé de :

Armen Harutyunyan, président,
Anja Seibert-Fohr,
Ana Maria Guerra Martins, juges,

et de Viktoriya Maradudina, greffière adjointe de section f.f.,

Vu les requêtes susmentionnées introduites aux dates indiquées dans le tableau joint en annexe,

Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par les requérants

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

FAITS ET PROCÉDURE

La liste des requérants se trouve dans le tableau joint en annexe.

Les griefs que les requérants tiraient de l’article 8 § 1 de la Convention (refus au prisonnier d’assister aux funérailles des membres de la famille proche) ont été communiqués au gouvernement roumain (« le Gouvernement »).

EN DROIT

  1. Jonction des requêtes

Compte tenu de la similitude des requêtes, la Cour estime approprié de les examiner conjointement en une seule décision.

  1. Griefs tires de l’article 8 § 1 de la Convention (refus au prisonnier d’assister aux funérailles des membres de la famille proche)

Le Gouvernement invoque les mêmes arguments que dans les affaires Vișa et Hoja c. Roumanie ((déc.) [comité], nos. 20108/17 et 28388/17, 13 décembre 2018), pour exciper en substance du non-épuisement des voies de recours internes. Il considère que les requérants ne sauraient pas se plaindre du refus de l’administration des prisons de leur accorder une autorisation de sortie dès lors qu’ils n’ont jamais demandée une telle autorisation.

Le Gouvernement fait valoir que les requérants n’ont pas formulé une demande d’autorisation de sortie afin d’assister aux funérailles des membres de leur famille proche auprès de la commission compétente des prisons dans lesquelles ils étaient incarcérés. Il soutient que malgré l’absence de toute demande, une fois que les autorités pénitentiaires ont été informées par les familles des requérants quant aux décès de leurs proches, les commissions compétentes se sont réunies pour analyser l’opportunité d’une autorisation de sortie de prison.

Par conséquent, le Gouvernement estime que les requêtes ne remplissent pas les conditions requises par les articles 34 et 35 de la Convention et cela à deux titres : d’une part, les requérants n’auraient pas la qualité de victime d’une violation de la Convention, et, d’autre part, les requérants n’auraient pas épuisé les voies de recours internes.

La Cour n’estime pas nécessaire de se pencher plus en avant sur la question relative à l’incompatibilité ratione personae avec les dispositions de la Convention, dans la mesure où les requêtes se heurtent à d’autres motifs d’irrecevabilité.

  1. Requêtes nos. 28351/19 et 24553/21

Dans la requête no 24553/21, le Gouvernement soutient que le certificat de décès de la grand-mère du requérant a été transmis par la mère du requérant à la prison de Drobeta-Turnu-Severin, le 16 mars 2021 à midi, alors que les funérailles avaient lieu le même jour à 14h00, dans un autre département.

Le requérant affirme que, le matin du 16 mars 2021, il a formulé une demande de sortie que les autorités de la prison ont refusé d’enregistrer. Il ne fournit pas de preuve à l’appui de ses allégations.

Dans la requête no 28351/19, le Gouvernement affirme que le requérant n’a pas formulé de demande de sortie. Il aurait seulement informé l’assistant social de la prison que les funérailles de son grand-père devaient avoir lieu le 10 janvier 2019. Le requérant n’a pas répondu aux observations du Gouvernement.

La Cour note que les requérants n’ont pas démontré avoir formulé des demandes de sortie de prison afin d’assister aux funérailles de leurs proches. Eu égard à ses constats dans les affaires Vișa et Hoja, précitées, concernant des situations similaires, la Cour accueille l’exception du Gouvernement et déclare les requêtes irrecevables pour non-épuisement des voies de recours internes.

À la lumière de ce qui précède, la Cour considère que ces requêtes doivent être rejetées en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

  1. Requête no 21299/19

La Cour constate qu’il ressort des pièces du dossier que le requérant s’est vu opposer un refus de sortie de prison le 28 mars 2019.

La décision de la « commission des récompenses » a été communiquée au requérant le jour même, soit le 28 mars 2019, date à laquelle le requérant a signé le rapport de la commission.

Le requérant a contesté ensuite la décision de la commission devant le juge chargé du contrôle de la privation de liberté et ensuite devant le tribunal de première instance d’Arad. Compte tenu de la date d’introduction de la requête devant la Cour, il convient d’examiner si le délai de six mois a été respecté en l’espèce. La Cour rappelle à cet égard que la règle des six mois est une règle d’ordre public et que, par conséquent, elle doit l’appliquer d’office (Sabri Güneş c. Turquie [GC], no 27396/06, § 29, 29 juin 2012).

La Cour renvoie aux principes bien établis dans sa jurisprudence concernant la règle des six mois (Sabri Güneş, précité, §§ 39-40). Elle rappelle, en particulier, que lorsque le requérant ne dispose d’aucun recours effectif, le délai de six mois prend naissance habituellement à la date des actes ou mesures dénoncés.

La Cour rappelle ensuite que, dans son arrêt de principe Kanalas c. Roumanie (no 20323/14, §§ 41-46, 6 décembre 2016), elle a considéré qu’une plainte formée devant le juge chargé du contrôle de la privation de liberté, fondée sur les dispositions de la loi no 254/2013 sur l’exécution des peines et des mesures privatives de liberté ordonnées par les autorités judiciaires au cours du procès pénal (« la loi no 254/2013 »), ne saurait être considérée, avec un degré suffisant de certitude comme un recours effectif pour la situation dénoncée par le requérant.

Eu égard également à ses constats dans les affaires Hârțescu et Arcana c. Roumanie ((dec.), nos. 31959/17 et 16655/18, 26 avril 2022) concernant des situations similaires, la Cour estime que le requérant aurait dû savoir que le recours fondé sur la loi no 254/2013 n’était pas un recours effectif au sens de la Convention.

À la lumière de ce qui précède, la Cour estime que le délai de six mois commençait à courir à compter du 28 mars 2019, date à laquelle le requérant a eu connaissance de la décision de la commission. Or la présente requête a été introduite devant la Cour le 7 octobre 2019, soit plus de six mois plus tard.

Il s’ensuit que la requête est tardive et doit être déclarée irrecevable, en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Décide de joindre les requêtes ;

Déclare les requêtes irrecevables.

Fait en français puis communiqué par écrit le 2 mars 2023.

Viktoriya Maradudina Armen Harutyunyan
Greffière adjointe f.f. Président


ANNEXE

Liste de requêtes concernant des griefs tirés de l’article 8 § 1 de la Convention
(refus au prisonnier d’assister aux funérailles de membres de famille proche)

No.

Numéro et date d’introduction de la requête

Nom du requérant et année de naissance

Date du refus des autorités pénitentiaires d’autoriser la sortie et motifs invoqués, le cas échéant

Personne décédée

Procédure judiciaire, le cas échéant

21299/19

07/10/2019

Janos CSIZMADIA

1968

28/03/2019

Les conditions prévues pour obtenir une récompense n’étaient pas réunies.

mère

Le requérant a demandé au juge de l’application des peines de la prison d’Arad la communication des motifs du refus. Sa demande a été rejetée au motif que la décision de la commission avait été communiquée au requérant et que la commission avait pris en compte les critères établis par la loi.

28351/19

24/07/2019

Alin-Daniel ROTARU

1986

-

grand-père

Par une décision du 27 mai 2019, le juge de l’application des peines de la prison de Drobeta Turnu Severin a rejeté la contestation du requérant. L’appel du requérant a été rejeté par une décision définitive du le tribunal de première instance de Drobeta Turnu Severin le 25/06/2019.

24553/21

22/04/2021

Claudiu-Ionuţ BOBOC

1997

16/03/2021

Les conditions prévues pour obtenir une récompense n’étaient pas réunies et le certificat de décès avait été fourni tardivement aux autorités de la prison

grand-mère