Přehled
Rozhodnutí
DEUXIÈME SECTION
DÉCISION PARTIELLE
SUR LA RECEVABILITÉ
de la requête no 44082/04
présentée par Hacı ÖZKAL
contre la Turquie
La Cour européenne des Droits de l'Homme (deuxième section), siégeant le 2 octobre 2007 en une chambre composée de :
Mme F. Tulkens, présidente,
MM. A.B. Baka,
I. Cabral Barreto,
M. Ugrekhelidze,
V. Zagrebelsky,
Mme A. Mularoni,
M. D. Popović, juges,
et de Mme S. Dollé, greffière de section,
Vu la requête susmentionnée introduite le 1er novembre 2004,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
EN FAIT
Le requérant, M. Hacı Özkal, est un ressortissant turc, né en 1956 et résidant à Gaziantep. Il est représenté devant la Cour par Me Z. Çolak, avocate à Ankara.
Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par le requérant, peuvent se résumer comme suit.
Selon le requérant, fonctionnaire de profession, à la demande d'une connaissance Hüseyin Çelik, le 30 avril 2002, le requérant accompagna Mevlüde Ölmez à la maison d'arrêt de Gaziantep, qui voulait rendre visite à son fils. Alors que cette dernière était avec son fils détenu, le requérant l'attendit dehors. Des soldats vinrent et l'invitèrent dans la salle d'attente en lui demandant sa pièce d'identité et la raison pour laquelle il attendait. Puis les soldats le fouillèrent et lui ordonnèrent de se déshabiller. Alors qu'il était en train d'enlever ses vêtements, un responsable en tenue civile lui présenta un stylo qui ne lui appartenait pas. Ce responsable sortit de l'intérieur du stylo un bout de papier sur lequel était écrit : « Au camarade Ali... Au nom du conseil du PKK[1], Cemal ». Le requérant fut interrogé à propos de ce stylo et ce papier. Il déclara que le stylo ne lui appartenait pas et qu'il ne savait rien au sujet du contenu du papier. En revanche, en sa qualité de membre du syndicat Eğitim-Sen, il avait sur lui un papier contenant des notes au sujet de l'organisation du syndicat.
Du 30 avril au 2 mai 2002, le requérant fut placé en garde à vue.
Le procès-verbal du 30 avril 2002 établi par les soldats de la maison d'arrêt de Gaziantep à savoir, Ahmet Refik Gezer, Atilla Tek, Veli Çelik, Abdülkerim Gözütok et Ali Çetin, indiqua que, suite à la fouille du requérant, il avait sur lui un document concernant le syndicat Eğitim-Sen ainsi que le stylo décrit ci-dessus.
Le 30 avril 2002, les cinq soldats lors de leur déposition réitérèrent le contenu du procès-verbal du 30 avril 2002.
Le même jour, le requérant fut entendu par la police. Il reconnut le document concernant le syndicat Eğitim-Sen dont il était membre. Il fit valoir que le stylo et le papier décrits ci-dessus ne lui appartenaient pas.
Le 2 mai 2002, la police fit un compte-rendu d'une enquête menée au sujet de personnes qui tentèrent de faire entrer dans la maison d'arrêt de Gaziantep le document appartenant à l'organisation illégale du PKK.
Le même jour, le requérant fut entendu par le procureur de la République de Gaziantep. Il contesta les faits qui lui étaient reprochés et clama son innocence. Il précisa qu'il n'était pas membre du PKK, et que le stylo et le papier litigieux ne lui appartenaient pas. Il reconnut être membre du syndicat Eğitim-Sen et que le document relatif à ce dernier lui appartenait.
Le même jour encore, le requérant fut entendu par le juge près le tribunal correctionnel de Gaziantep. Il protesta de son innocence et contesta les faits qui lui étaient reprochés. Le juge ordonna la mise en détention provisoire du requérant.
Le 8 mai 2002, le parquet de Gaziantep intenta une action pénale contre six personnes dont le requérant pour aide et appartenance à l'organisation illégale du PKK. Il se déclara incompétent ratione materiae au profit du parquet près la cour de sûreté de l'Etat d'Adana.
Cette accusation était reprise le 16 mai 2002 par le procureur de la République près la cour de sûreté de l'Etat d'Adana.
Par un arrêt du 16 avril 2003, se fondant sur le procès-verbal du 30 avril 2002 établi par les cinq soldats, sur les dépositions de ces derniers ainsi qu'au fait qu'un stylo contenait un document ayant été retrouvé sur le requérant, la cour de sûreté de l'Etat d'Adana condamna le requérant à une peine d'emprisonnement de trois ans et neuf mois pour aide à l'organisation illégale du PKK, ainsi qu'à son exclusion de la fonction publique pour une durée de trois ans.
Dans son avis écrit du 18 mars 2004, le procureur général près la Cour de cassation demanda la cassation de l'arrêt rendu par la Cour de sûreté de l'Etat concernant le requérant pour insuffisance de l'enquête pénale, notamment parce que Hüseyin Çelik et Mevlüde Ölmez n'avaient pas été entendus ; le requérant n'ayant pas demandé à voir un détenu de la maison d'arrêt de Gaziantep, il convenait de vérifier s'il avait cherché à rencontrer d'autres membres de l'organisation à Diyarbakır et à Gaziantep ; parmi les auteurs du procès-verbal du 30 avril 2002, seul le soldat Abdülkerim Gözütok avait été entendu par commission rogatoire et pas les autres soldats.
Par un arrêt du 11 mai 2004, prononcé en audience publique en présence de l'avocat du requérant le 26 mai 2004, la Cour de cassation confirma l'arrêt attaqué.
GRIEFS
Invoquant l'article 6 §§ 1 et 3 d) de la Convention, le requérant se plaint qu'il a été condamné sur le fondement des dépositions et des procès-verbaux établis par les soldats de la maison d'arrêt de Gaziantep à savoir Ahmet Refik Gezer, Atilla Tek, Veli Çelik, Abdülkerim Gözütok et Ali Çetin. Le requérant soutient qu'il n'a pas eu la possibilité d'interroger ces témoins. En outre, il allègue que les témoins clefs Hüseyin Çelik et Mevlüde Ölmez n'ont pas été entendus.
Il soutient que l'enquête préliminaire était incomplète dans la mesure où les juridictions nationales ne se sont pas prononcées sur le point de savoir si le requérant était le vrai propriétaire du stylo et du document provenant de l'organisation illégale.
Invoquant l'article 7 § 1 de la Convention, le requérant soutient que l'infraction qui lui avait été reprochée n'avait pas été constituée puisqu'il n'avait pas rendu visite aux membres de l'organisation illégale litigieuse. Alors qu'il attendait près des affaires de Mevlüde Ölmez, il a été fouillé par les soldats de la maison d'arrêt.
Invoquant l'article 2 § 1 du Protocole no 4, le requérant soutient qu'en raison de sa condamnation, son droit à la liberté de circulation a été méconnu.
EN DROIT
1. Invoquant les articles 6 §§ 1 et 3 d) ainsi que 7 de la Convention, le requérant soutient que la procédure pénale menée contre lui n'a pas été équitable.
En l'état actuel du dossier, la Cour ne s'estime pas en mesure de se prononcer sur la recevabilité de ce grief et juge nécessaire de communiquer cette partie de la requête au gouvernement défendeur conformément à l'article 54 § 2 b) de son règlement.
2. Invoquant l'article 2 § 1 du Protocole no 4, le requérant soutient la méconnaissance de son droit à la liberté de circulation en raison de sa condamnation. Toutefois, la Turquie n'a pas ratifié ce Protocole.
Il s'ensuit que ce grief est incompatible ratione personae avec les dispositions de la Convention au sens de l'article 35 § 3 et doit être rejeté en application de l'article 35 § 4.
Par ces motifs, la Cour, à l'unanimité,
Ajourne l'examen des griefs du requérant tirés de l'absence d'équité de la procédure engagée à son encontre ;
Déclare la requête irrecevable pour le surplus.
S. Dollé F. Tulkens
Greffière Présidente
1. Le parti des travailleurs du Kurdistan, une organisation illégale.