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DEUXIÈME SECTION

DÉCISION

Requête no 15843/06
présentée par Zakaria BARAKA
contre la France

La Cour européenne des Droits de l’Homme (deuxième section), siégeant le 5 décembre 2006 en une chambre composée de :

MM. A.B. Baka, président,
J.-P. Costa,
I. Cabral Barreto,
Mmes A. Mularoni,
E. Fura-Sandström,
D. Jočienė,
M. D. Popović, juges,
et de M. S. Naismith, greffier adjoint de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 26 avril 2006,

Vu la décision de la Cour de se prévaloir de l’article 29 § 3 de la Convention et d’examiner conjointement la recevabilité et le fond de l’affaire,

Vu la mesure provisoire indiquée au gouvernement défendeur en vertu de l’article 39 du règlement de la Cour à compter du 27 avril 2006 et le constat que cette indication fut respectée,

Vu la décision de traiter en priorité la requête en vertu de l’article 41 du règlement de la Cour,

Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur,

Vu la lettre du 6 novembre 2006 par laquelle le représentant du requérant informa la Cour de la volonté de son client de se désister de sa requête,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Zakaria Baraka, est un ressortissant tchadien, né en 1976 et résidant à Caen. Il est représenté devant la Cour par Me M. Le Boulanger, avocat à Caen. Le gouvernement français (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, Mme E. Belliard, directrice des Affaires juridiques au ministère des Affaires étrangères.

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.

Le requérant, d’origine touboue, appartient au Mouvement pour la Démocratie et la Justice au Tchad (MDJT), mouvement de lutte armée. Il s’agit de l’une des branches du front uni pour le changement (FUC) qui s’oppose au Président Déby. Le requérant créa un comité de soutien au MDJT ayant pour but de collecter des fonds et de les envoyer à la rébellion au nord du Tchad.

Le 5 mai 2002, il aurait été arrêté en raison de ses activités par l’Agence nationale de sécurité (ANS). Interrogé par des agents de l’ANS, il allègue avoir subi des tortures (ligotage de bras, fils électriques). Compte tenu de son état à la suite de ces mauvais traitements, il aurait été hospitalisé à l’hôpital de garnison de N’Djamena le 12 juillet 2002, dont il se serait évadé le 5 août 2002. Son oncle l’aurait ensuite déposé à la frontière du Tchad et du Niger. Il serait arrivé à Alger le 13 août et à Marseille le 16 août 2002.

Le 24 septembre 2002, le requérant sollicita la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande fut rejetée par une décision de l’Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA) rendue le 17 juillet 2003 et ainsi motivée :

« (...) que la réalité de la situation invoquée ne peut être tenue pour établie et que les craintes énoncées ne peuvent être tenues pour fondées au sens de l’article 2 de la loi du 25 juillet 1952 modifiée.

L’intéressé, de nationalité tchadienne originaire de Moussoro et de l’ethnie Toubou, déclare avoir été victime de persécutions en raison de son militantisme au sein du MDJT (Mouvement pour la Démocratie et la Justice au Tchad). Il aurait été militant depuis le 17 janvier 2002 au sein d’un comité de soutien du parti à N’Djamena avec d’autres personnes appartenant à la même cellule. L’intéressé déclare avoir pour mission la collecte des fonds, au bénéfice de la rébellion. Il soutient avoir été interpellé en date du 5 mai 2002 par des agents de l’ANS (Agence Nationale de Sécurité) et conduit dans leur siège à N’Djamena. Il prétend avoir été maltraité pendant deux mois et trois jours jusqu’à son hospitalisation à la garnison militaire de N’Djamena. Il aurait été soigné dans un service médical appartenant à l’armée pendant vingt-trois jours avant de réussir à s’évader le 5 août 2002. Suite à son évasion, il se serait réfugié au Niger. Le 16 août 2002, il gagne la France via l’Algérie.

Cependant, les déclarations orales de l’intéressé, entendu à l’Office en date du 1er juillet 2003, sont caractérisées par leur brièveté et leur imprécision. L’intéressé s’est montré évasif et hésitant dans toutes ses déclarations, notamment sur les raisons personnelles de son adhésion, son militantisme au sein du MDJT depuis le 17 janvier 2002, sur les circonstances de son arrestation et sur les conditions de son évasion et de sa sortie du territoire tchadien. En conséquence, il ressort de l’instruction du dossier de l’intéressé que les faits qu’il a évoqués ne sont pas tenus pour établis. Par conséquent, ses craintes personnelles et actuelles ne peuvent être considérées comme fondées au sens des dispositions de l’article 2 de la loi du 25 juillet 1952, modifiée. (...) »

Cette décision fut confirmée le 19 février 2004 par la Commission des recours des réfugiés (CRR).

Le 6 mai 2004, le requérant soumit à l’OFPRA une nouvelle demande d’admission au bénéfice de l’asile en se fondant sur son arrestation et les mauvais traitements subis dans son pays. L’OFPRA rejeta cette demande le 26 mai 2004 estimant que :

« (...) A l’appui de sa demande, M. BARAKA Zakaria fait à nouveau état de son arrestation et des mauvais traitements subis dans son pays.

Toutefois, ces faits sont ceux sur lesquels la Commission s’était précédemment prononcée.

Dès lors ils n’ont pas le caractère de faits nouveaux et ne sont pas recevables.

En conséquence, cette demande ayant, par rapport à la précédente, le même objet et pas de cause juridiquement distincte, l’Office ne peut que confirmer sa précédente décision de rejet. (...) »

La CRR confirma cette décision le 8 mars 2005.

Le 8 avril 2006, le requérant fut interpellé et le même jour lui furent notifiés un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière et un arrêté fixant le pays de destination, en l’espèce le Tchad. Il fut placé en centre de rétention administrative le même jour.

Le 10 avril 2006, le requérant introduisit un recours en annulation des arrêtés précités devant le tribunal administratif de Melun. Ce dernier rejeta le recours du requérant le 14 avril 2006.

Le 13 avril, une tentative de rébellion éclata au Tchad.

Le 19 avril 2006, depuis le centre de rétention et par l’intermédiaire de la CIMADE, le requérant sollicita le réexamen de sa demande d’asile politique, les événements se déroulant alors au Tchad étant, selon lui, susceptibles de constituer des éléments nouveaux à l’appui de la réouverture de son dossier.

Le 24 avril 2006, la préfecture de la Sarthe rejeta la demande du requérant comme étant tardive.

Le 27 avril 2006, le président en exercice de la deuxième section décida d’indiquer au gouvernement français en vertu de l’article 39 du règlement de la Cour, qu’il était souhaitable de ne pas expulser le requérant vers le Tchad. Il invita le requérant et le gouvernement à fournir des informations complémentaires. En réponse, le gouvernement indiqua notamment que le requérant avait été mis en liberté, placé, par arrêté du 4 mai 2006, sous le régime de l’assignation à résidence et que son éloignement du territoire français avait été suspendu.

Le 16 mai 2006, le président en exercice de la chambre décida de proroger jusqu’à nouvel ordre la mesure indiquée en application de l’article 39 du règlement de la Cour.

GRIEFS

A l’origine, invoquant l’article 3 de la Convention, le requérant contestait la procédure d’éloignement du territoire français dont il a fait l’objet et soutenait qu’un retour vers le Tchad l’exposait à des traitements inhumains.

Invoquant l’article 13 de la Convention, le requérant allèguait une violation de son droit à un recours effectif.

EN DROIT

La Cour note que, le 7 novembre 2006, elle a été informée par une lettre du représentant du requérant, datée de la veille, de la volonté de son client de se désister de sa requête. A cette lettre était jointe une déclaration de désistement du 30 octobre 2006, datée et signée par le requérant et dénuée de toute ambiguïté.

La Cour constate par conséquent que le requérant n’entend plus maintenir sa requête au sens de l’article 37 § 1 a) de la Convention.

Dès lors qu’il ne ressort du dossier et de la déclaration de désistement ainsi rédigée aucune circonstance particulière touchant au respect des Droits de l’Homme garantis par la Convention et exigeant la poursuite de l’examen de la requête en vertu de l’article 37 § 1 in fine de la Convention, la Cour considère qu’il y a lieu de rayer la requête du rôle.

Elle décide également de mettre fin à l’application de l’article 29 § 3 de la Convention et estime enfin que la mesure provisoire indiquée au Gouvernement défendeur en vertu de l’article 39 du règlement de la Cour ne se justifie désormais plus.


Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Décide la levée de la mesure provisoire indiquée au Gouvernement en vertu de l’article 39 du règlement de la Cour ;

Décide de rayer la requête du rôle.

S. Naismith A.B. Baka
Greffier adjoint Président