Přehled

Text rozhodnutí
Datum rozhodnutí
9.11.2006
Rozhodovací formace
Významnost
3
Číslo stížnosti / sp. zn.

Rozhodnutí

TROISIÈME SECTION

DÉCISION

SUR LA RECEVABILITÉ

de la requête no 59441/00
présentée par Ilija RANČIĆ
contre la Slovénie

La Cour européenne des Droits de l’Homme (troisième section), siégeant le 9 novembre 2006 en une chambre composée de :

MM. J. Hedigan, président,
B.M. Zupančič,
C. Bîrsan,
Mme A. Gyulumyan,
MM. E. Myjer,
David Thór Björgvinsson,
Mme I. Berro-Lefevre, juges,
et de M. V. Berger, greffier de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 19 juillet 2000,

Vu la décision de la Cour de se prévaloir de l’article 29 § 3 de la Convention et d’examiner conjointement la recevabilité et le fond de l’affaire,

Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par le requérant,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Ilija Rančić, est un ressortissant slovène d’origine serbe, né en 1944 et résidant à Vipava. Il est représenté devant la Cour par M. M. Krivic. Le gouvernement slovène (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. L. Bembič, procureur général de l’Etat.

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.

1. Procédure relative à la demande d’attribution d’un acompte sur une pension militaire

Le requérant est un ancien membre du Service secret de l’Armée populaire yougoslave (« l’APY »).

Suite à l’accès de la Slovénie à l’indépendance le 25 juin 1991, l’APY se retira du territoire slovène après des combats d’une dizaine de jours.

Le 12 février 1992, le requérant demanda à la caisse slovène d’assurance vieillesse et invalidité de lui accorder un acompte sur sa pension de retraite militaire, préalablement accordée par les autorités de l’APY.

Le 31 mars 1992, la caisse rejeta sa demande, étant donne qu’il ne remplissait pas toutes les conditions fixées par la législation pertinente. Le requérant contesta cette décision auprès de l’autorité centrale de la caisse, laquelle rejeta sa contestation le 21 mai 1992.

Le 29 juin 1992, le requérant intenta alors une procédure devant le tribunal des affaires sociales. Le 21 septembre 1992, ce dernier demanda au ministère de la Défense de préparer un avis.

Le 7 octobre 1992, une audience fut tenue. Le 13 novembre 1992, le ministère soumit son avis. Une autre audience fut tenue le 25 novembre 1992.

Le 6 octobre 1993, après une audience, le tribunal rejeta se demande, estimant qu’il ne remplissait pas toutes les conditions prévues par le décret de 1992.

Le requérant interjeta appel, mais le tribunal supérieur le débouta le 23 février 1995.

Enfin, le 16 juin 1995, le requérant présenta un recours auprès de la Cour suprême.

Selon les informations fournies par le Gouvernement, le 10 septembre 1996, la Cour suprême rejeta son recours. Cette décision fut notifiée au requérant le 29 octobre 1996.

Enfin, le 11 novembre 2003, sur le fondement de la nouvelle législation, une pension de vieillesse fut attribuée au requérant à partir du 22 janvier 2003.

2. Procédure relative à la demande de naturalisation

Le 7 octobre 1991, le requérant formula une demande de naturalisation, laquelle fut rejetée par le ministère de l’Intérieur le 7 juillet 1992. Il intenta un litige administratif auprès de la Cour suprême.

Par ailleurs, le 17 novembre 1992, le requérant fut rayé du registre des personnes domiciliées en Slovénie.

Le 21 octobre 1993, la Cour suprême rejeta sa demande.

Le 25 janvier 2001, le requérant présenta un recours constitutionnel contre la décision de la Cour suprême, lequel fut rejeté par la Cour constitutionnelle le 27 novembre 2001, comme étant tardif. Cette décision lui fut notifiée le 18 décembre 2001.

Par ailleurs, le 19 octobre 2000, le requérant formula une nouvelle demande de naturalisation. Le 29 avril 2002, sa demande fut rejetée.

Enfin, le 25 mars 2002, le requérant introduisit une nouvelle demande. Le 10 janvier 2003, le requérant acquit la nationalité slovène. Cette décision lui fut notifiée le 22 janvier 2003.

GRIEFS

1. Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, le requérant se plaint de la durée de la procédure concernant l’acompte sur sa pension militaire.

Lors de l’introduction de la requête et au cours de la procédure devant la Cour, le requérant affirmait que la Cour suprême n’avait pas encore statué sur son cas. De plus, il se plaignait de l’iniquité de cette procédure et attaquait la législation de 1992 relative à l’attribution de l’acompte. Il estimait par ailleurs qu’il avait également été victime de torture contrairement à l’article 3 de la Convention. Enfin, son droit au respect de ses biens, protégé par l’article 1 du Protocole no 1, seul et combiné avec l’article 14 de la Convention, aurait également été violé.

2. En 2002, sur le terrain de l’article 6 § 1, le requérant s’est plaint de l’iniquité des décisions relatives à sa demande de naturalisation et en particulier du changement de la législation intervenu pendant la procédure. Il s’est dit victime de torture, contrairement à l’article 3. Il s’est plaint également de la violation des articles 9, garantissant la liberté de pensée, et 14, interdisant la discrimination. Enfin, il s’est plaint de la violation de son droit à sa liberté de circulation garanti par l’article 2 du Protocole no 4.

EN DROIT

1. Le premier grief du requérant porte sur la durée de la procédure qui a débuté le 12 févier 1992 et s’est terminée le 29 octobre 1996 par la notification de la décision de la Cour suprême au requérant. Elle a donc duré 4 ans, 8 mois et 17 jours. De plus, le requérant se plaint de l’iniquité de cette procédure. Il estime par ailleurs qu’il également été victime de torture contrairement à l’article 3 de la Convention. Enfin, son droit au respect de ses biens, protégé par l’article 1 du Protocole no 1, seul et combiné avec l’article 14 de la Convention, serait violé.

La Cour constate que la procédure relative à l’attribution d’un acompte sur la pension de retraite militaire du requérant s’est terminée le 29 octobre 1996, quand la décision de la Cour suprême a été notifiée au requérant. Eu égard au fait que la requête a été introduite le 19 juillet 2000, plus de six mois se sont écoulés depuis la notification de la décision de la Cour suprême au requérant.

En outre, la Cour note que le requérant s’est vu attribuer le 11 novembre 2003, une pension de vieillesse sur le fondement de la nouvelle législation.

Il s’ensuit que les griefs relatifs à la procédure terminée le 29 octobre 1996 sont tardifs et doivent être rejetés en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

2. Par ailleurs, sur le terrain de l’article 6 § 1, le requérant s’est plaint en 2002 de l’iniquité des décisions relatives à sa demande de naturalisation et en particulier du changement de la législation intervenu pendant la procédure. Il s’est dit victime de torture, contrairement à l’article 3. Il s’est plaint également de la violation des articles 9, garantissant la liberté de pensée, et 14, interdisant la discrimination. Enfin, il s’est plaint de la violation de son droit à sa liberté de circulation garantie par l’article 2 du Protocole no 4.

La Cour rappelle en premier lieu que les décisions relatives à l’entrée, au séjour et à l’éloignement des étrangers n’emportent pas contestation sur des droits ou obligations de caractère civil du requérant et n’ont pas trait au bien-fondé d’une accusation en matière pénale dirigée contre lui au sens de l’article 6 de la Convention, car elles sont étroitement liées à l’exercice de prérogatives par la puissance publique (voir mutatis mutandis, Maaouia c. France, no 39652/98, §§ 34-41, CEDH 2000X, Slivenko et autres c. Lettonie (déc.) [GC], no 48321/99, §§ 94-95, CEDH 2002-II).

Il s’ensuit que l’article 6 n’est pas applicable aux procédures de naturalisation et que cette partie de la requête devrait être rejetée comme incompatible ratione materiae avec les dispositions de la Convention.

En tout état de cause, la Cour constate que la première procédure relative à la naturalisation s’est terminée le 21 octobre 1993, donc avant le 28 juin 1994 quand la Convention est entrée en vigueur pour la Slovénie.

Or, la Convention ne régit, pour chacune des Parties contractantes, que les faits postérieurs à son entrée en vigueur à l’égard de cette Partie. Il s’ensuit que les griefs ayant trait à la première procédure de naturalisation sont incompatibles ratione temporis avec les dispositions de la Convention. Le requérant n’a d’ailleurs pas valablement épuisé les voies de recours internes, étant donné que son recours constitutionnel a été rejeté le 27 novembre 2001 comme étant tardif.

Enfin, la Cour relève que le requérant ne pourrait plus se prétendre victime des violations alléguées, étant donné qu’il a été naturalisé slovène le 10 janvier 2003.

Il s’ensuit que cette partie de la requête doit être rejetée en application de l’article 35 § 4.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Déclare la requête irrecevable.

Vincent Berger John Hedigan
Greffier Président