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Text rozhodnutí
Datum rozhodnutí
2.10.2006
Rozhodovací formace
Významnost
3
Číslo stížnosti / sp. zn.

Rozhodnutí

CINQUIÈME SECTION

DÉCISION

SUR LA RECEVABILITÉ

de la requête no 18152/02
présentée par Anatoliy Illich SKACHKO
contre l’Ukraine

La Cour européenne des Droits de l’Homme (cinquième section), siégeant le 2 octobre 2006 en une chambre composée de :

M. P. Lorenzen, président,
Mme S. Botoucharova,
M. V. Butkevych,
Mme M. Tsatsa-Nikolovska,
MM. R. Maruste,
J. Borrego Borrego,
Mme R. Jaeger, juges,
et de Mme C. Westerdiek, greffière de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 12 mars 2002,

Vu la décision de la Cour de se prévaloir de l’article 29 § 3 de la Convention et d’examiner conjointement la recevabilité et le fond de l’affaire,

Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par la requérante,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Anatoliy Illich Skachko, est un ressortissant ukrainien, né en 1939. Le gouvernement ukrainien (« le Gouvernement ») est représenté par ses agents, Mme Valeria Lutkovska et M. Yuriy Zaytsev, du Ministère de la Justice.

Le 9 janvier 2006, le requérant décéda. Par une lettre du 18 avril 2006, son épouse, Mme Skachko Iryna Mykhaylivna, a exprimé son désir de poursuivre la procédure devant la Cour.

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.

Le 25 juillet 2001, le requérant assigna un concessionnaire d’automobile devant le tribunal d’arrondissement Kharkivskiy a Kiev d’une demande de réparation du dommage causé par l’exécution non-conforme de certaines clauses du contrat de vente d’une automobile. Le département de la protection des consommateurs à Kiev fut désigné dans cette affaire comme tierce partie.

Le 29 octobre 2001, le tribunal de première instance d’arrondissement Kharkivskiy à Kiev fut dissout. Par une décision du 13 novembre 2001, le tribunal de première instance d’arrondissement Dneprovskiy à Kiev, en se référant au lieu du siège de la défenderesse, attribua la compétence au tribunal d’arrondissement Solomenskiy à Kiev. Le requérant interjeta appel faisant valoir que le tribunal compétant était celui du lieu du domicile de la demanderesse. Par un arrêt du 15 janvier 2002, la Cour d’appel de Kiev infirma la décision du 13 novembre 2001 et renvoya l’affaire au tribunal de première instance d’arrondissement Darnitskiy à Kiev (ci-après « le tribunal de première instance ») pour un examen au fond.

Des quatre audiences qui eurent lieu entre le 12 mars et le 22 avril 2002, deux furent rapportées : une afin de permettre au requérant de détailler sa demande et une pour absence du requérant.

Par une ordonnance du 11 mai 2002, le tribunal de première instance, après avoir relevé des documents douteux, renvoya le dossier au parquet pour vérifications.

Par la suite, sept audiences furent fixées entre le 25 juillet 2002 et le 27 janvier 2003 dont quatre furent reportées en raison de l’absence des parties et une à la demande du requérant qui souhaitait détailler sa demande. Des quatre audiences suivantes qui eurent lieu entre le 29 avril 2002 et 25 septembre 2002, deux furent rapportées pour non-comparution de la tierce partie.

Le 28 janvier 2003, la partie défenderesse déposa une demande reconventionnelle.

Par une décision du 26 février 2003, le tribunal de première instance ordonna une expertise technique. Le 25 avril 2004, le rapport d’expertise fut achevé.

Des six audiences fixées entre le 25 mai 2003 et 17 juillet 2003, quatre furent rapportées pour non-comparution des parties ou de l’expert. En particulier, le requérant ne s’était pas présenté à l’audience du 10 juillet 2003.

Par une décision du 25 juillet 2003, le tribunal de première instance ordonna un complément d’expertise.

Entre le 9 janvier et le 23 juillet 2004, dix audiences eurent lieu. Cinq furent rapportées dont trois à la demande du représentant de la défenderesse, une suite à l’explosion criminelle dans les locaux du tribunal de première instance, et une pour non-comparution d’un témoin.

Par une décision 23 juillet 2004, le tribunal de première instance ordonna un nouveau complément d’expertise.

Le 5 janvier 2005, la partie défenderesse retira sa demande reconventionnelle.

Par un jugement du 6 janvier 2005, le tribunal de première instance accueillit partiellement la demande du requérant et lui alloua un montant de 171 796,63[1] UAH. La défenderesse interjeta appel.

Par un arrêt du 5 avril 2005, la Cour d’appel de Kiev infirma partiellement le jugement précité en diminuant le montant total alloué de 18 500[2] UAH. La défenderesse se pourvut en cassation.

Par un arrêt du 12 janvier 2006, notifié à l’épouse du requérant le 30 mars 2006, la Cour Suprême de l’Ukraine cassa les décisions précitées et, statuant au fond, débouta le requérant.

GRIEF

Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, le requérant se plaint de la durée de la procédure.

EN DROIT

1. La Cour constate, tout d’abord, que M. Skachko est décédé, le 9 janvier 2006, et que sa veuve, Mme Skachko Iryna Mykhaylivna, a informé la Cour de son souhait de poursuivre la procédure.

La Cour rappelle que, dans plusieurs cas, elle a tenu compte d’un vœu analogue, exprimé par les membres de la proche famille d’un requérant décédé, de voir la procédure se poursuivre (voir, parmi beaucoup d’autres, Raimondo c. Italie, arrêt du 22 février 1994, p. 8, § 2). Compte tenu de la jurisprudence précitée, la Cour décide d’accueillir sa demande.

2. La partie requérante se plaint de la durée de la procédure civile. Elle invoque l’article 6 § 1 de la Convention, dont la partie pertinente se lit comme suit :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »

Le Gouvernement soutient que l’examen de l’affaire s’est déroulé sans retards particuliers pouvant être attribués aux tribunaux : pendant les audiences régulières, un certain nombre de témoins a été entendu et des expertises ont été ordonnées etc.

La partie requérante maintient que l’affaire ne présentait aucune complexité et que toutes les données de l’espèce, nécessaires pour trancher l’affaire, avaient été établies au début de l’examen.

La Cour constate que la période à prendre en considération a débuté le 25 juillet 2001 et s’est achevée le 30 mars 2006 avec la notification de l’arrêt de la Cour Suprême de l’Ukraine à l’épouse du requérant.

La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par sa jurisprudence, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes ainsi que l’enjeu du litige pour les intéressés (voir, parmi beaucoup d’autres, Frydlender c. France [GC], no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII).

D’une part, la Cour note que l’affaire présentait une certaine complexité et nécessitait, notamment, l’accomplissement des expertises techniques. La Cour constate également que, au cours de la procédure, le requérant a apporté quelques modifications à sa demande. Toutefois, si certains retards peuvent être imputés au requérant, ceux-ci ne sont pas significatifs. En effet, ses sollicitations d’ajournement afin de détailler sa demande n’ont pas contribué à ralentir la procédure. Par ailleurs, l’on ne saurait reprocher au requérant d’avoir usé de divers recours internes pour défendre ses droits (voir, notamment, Erkner et Hofauer c. Autriche, arrêt du 23 avril 1987, série A no 117, p. 63, § 68).

D’autre part, la Cour constate que les audiences ont été fixées régulièrement et que si tout au long de la procédure, celles-ci ont été ajournées et rapportées à maintes reprises, cela était toujours justifié soit par la non-comparution des parties, soit par la nécessité de convoquer des témoins et des experts. La Cour estime alors que ces retards ne sauraient être imputés à une action ou omission des autorités ukrainiennes, ni à l’organisation d’un système judicaire qui prévoit des tels renvois dès lors qu’ils n’apparaissent pas abusifs, tels qu’en l’espèce.

Eu égard à ces éléments, la Cour estime que les autorités ont globalement fait preuve de la diligence requise dans la conduite de l’affaire du requérant.

De ce fait, la Cour considère que, eu égard aux faits de la cause et à ce que trois instances ont eu à connaître de l’affaire, la durée globale de la procédure prise dans son ensemble, qui est de quatre ans et huit mois, ne saurait être considérée comme excessive au sens de l’article 6 § 1 de la Convention.

Il s’ensuit que le grief doit être rejeté comme manifestement mal fondé au sens de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Déclare la requête irrecevable.

Claudia Westerdiek Peer Lorenzen
Greffière Président


[1] 27 780 euros environ

[2] 2 991 euros environ