Přehled

Text rozhodnutí
Datum rozhodnutí
19.9.2006
Rozhodovací formace
Významnost
3
Číslo stížnosti / sp. zn.

Rozhodnutí

DEUXIÈME SECTION

DÉCISION

Requête no 3919/02
présentée par Alain GENITEAU
contre la France

La Cour européenne des Droits de l’Homme (deuxième section), siégeant le 19 septembre 2006 en une chambre composée de :

MM. A.B. Baka, président,
J.-P. Costa,
I. Cabral Barreto,
R. Türmen,
M. Ugrekhelidze,
Mmes A. Mularoni,
D. Jočienė, juges,
et de Mme S. Dollé, greffière de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 13 janvier 2002,

Vu la décision de la Cour de se prévaloir de l’article 29 § 3 de la Convention et d’examiner conjointement la recevabilité et le fond de l’affaire,

Vu les déclarations formelles d’acceptation d’un règlement amiable de l’affaire,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Alain Géniteau, est un ressortissant français, né en 1949 et résidant à Brest. Le gouvernement français (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, Mme Edwige Belliard, Directrice des affaires juridiques au ministère des Affaires étrangères.

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.

Le 14 avril 1998, la société Suez Lyonnaise des eaux (ci-après « Lyonnaise des eaux ») déposa une offre publique de retrait suivi d’un retrait obligatoire visant les actions de la société Elyo (ci-après « Elyo »), dont le requérant était actionnaire minoritaire.

Par un courrier du 17 avril suivant, le requérant saisit le Conseil des marchés financiers (CMF) de ses réserves à l’égard de ce projet, contestant le prix de 360 francs français (FRF), soit 54,88 euros (EUR), fixé pour les actions Elyo et exprimant ses doutes sur le fait que les comptes de la société offraient un reflet fidèle de sa situation. Le requérant fut entendu par le CMF le 28 avril 1998.

A la suite d’une séance du CMF en date du 6 mai 1998, la Lyonnaise des eaux s’engagea au rachat des actions Elyo au prix de 375 FRF, soit 57,17 euros (EUR) et déposa une offre publique de retrait modifiée le 13 mai 1998.

Par une décision du 14 mai 1998, le CMF déclara recevable l’offre publique de retrait des actions Elyo.

Le requérant saisit la cour d’appel de Paris d’un recours en annulation de la décision du 14 mai 1998 en raison de son irrégularité et du non-respect du principe du contradictoire. Il demanda également à la cour de surseoir à statuer dans l’attente de l’issue d’une procédure pénale en cours, mettant en cause les informations fournies sur les comptes d’Elyo et d’ordonner la production aux débats de la décision délibérée par le CMF, du procès-verbal de la réunion du 14 mai 1998, ainsi que de toutes les données prises en compte par le CMF pour fixer le prix de l’action Elyo en vue du retrait obligatoire.

Par un mémoire complémentaire du 27 mai 1998, le requérant demanda en outre à la cour d’appel de constater la violation des articles 6 de la Convention et 1 du Protocole no 1.

La Lyonnaise des eaux et Elyo conclurent au rejet du recours du requérant. Le CMF versa aux débats un extrait du procès-verbal susmentionné ainsi que le dossier complet de ses séances des 6 et 14 mai 1998. Il releva également que, bien qu’il ne soit pas soumis au principe du contradictoire, le requérant avait pu présenter ses observations orales et écrites, et que rien ne l’obligeait à assurer la publicité d’une demande de réexamen telle que celle présentée par le requérant le 17 avril 1998.

Invité, en vertu du droit interne, à présenter ses observations, le président de la Commission des opérations de bourses (ci-après « COB ») donna, dans un communiqué paru le 22 mai 1998, un avis motivé, selon lequel il résultait de l’application des critères retenus par le CMF qu’une indemnisation équitable des actionnaires minoritaires était assurée et que la décision du 14 mai 1998 apparaissait justifiée.

Par arrêt du 3 juillet 1998, la cour d’appel de Paris rejeta les « réserves » faites par le requérant sur le respect de l’article 6 de la Convention par la procédure devant le CMF, ainsi que ses demandes de sursis à statuer et de communication de pièces. La cour d’appel écarta aussi les doutes exprimés par le requérant quant à l’indépendance de l’expert chargé de donner un avis sur le prix de rachat des actions.

Le requérant forma un pourvoi en cassation.

Par un arrêt du 17 juillet 2001, à l’issue d’une l’audience publique au cours de laquelle l’avocat à la Cour de cassation et au Conseil d’Etat (ciaprès, « avocat aux Conseils ») du requérant présenta ses observations, la chambre commerciale de la Cour de cassation rejeta le pourvoi.

Le requérant saisit, par ailleurs, la cour d’appel de Paris d’un recours en annulation de la décision susmentionnée de la COB, donnant un avis favorable sur la décision du CMF du 14 mai 1998. Le requérant demandait à la cour de surseoir à statuer dans les mêmes termes que dans son autre recours, ainsi que la communication de l’entier dossier transmis à la COB.

Par un arrêt du 3 novembre 1998, la cour d’appel rejeta ces deux dernières demandes, ainsi que le recours sur le fond.

Le requérant forma un pourvoi en cassation.

Par un arrêt du 17 juillet 2001, à l’issue d’une audience publique au cours de laquelle l’avocat aux Conseils du requérant présenta ses observations, la chambre commerciale de la Cour de cassation rejeta le pourvoi.

GRIEFS

1. Invoquant l’article 1 du Protocole no 1, le requérant se plaignait d’avoir été, du fait de l’offre publique de retrait, « exproprié » de ses actions Elyo en tant qu’actionnaire minoritaire et que la décision du CMF du 14 mai 1998 n’avait pas constaté l’utilité publique « in concreto » d’une telle opération. A cet égard, il alléguait également que l’expert indépendant chargé de donner un avis sur le montant de rachat des actions n’était ni indépendant ni impartial et qu’il aurait commis une erreur d’évaluation non reconnue par les juridictions internes.

2. Citant les articles 6 et 13 de la Convention, il se plaignait :

a) que le CMF ne soit pas un tribunal indépendant et impartial et de ne pas avoir bénéficié devant lui d’un débat à armes égales faute d’avoir eu communication de tous les éléments transmis par l’initiateur de l’offre publique de retrait, ainsi que de l’absence de publicité des débats et de la décision ;

b) du fait que le recours dont il disposait devant la cour d’appel de Paris n’était pas de nature à pallier les lacunes de la procédure devant le CMF, faute pour cette juridiction de disposer des outils de connaissance nécessaires en matière financière et boursière.

3. Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, il se plaignait de la durée des procédures ayant abouti aux deux arrêts de la Cour de cassation du 17 juillet 2001.

4. Sur le même fondement, il se plaignait de la « dénaturation » par la Cour de cassation de son recours formé contre la décision de la COB.

5. Enfin, sur le même fondement, il alléguait n’avoir eu connaissance, avant l’audience devant la Cour de cassation, ni du rapport du conseiller rapporteur, alors que ce document aurait été communiqué à l’avocat général, ni des conclusions de ce dernier et de l’impossibilité d’y répondre, l’avocat général n’ayant donné lecture de ses conclusions à l’audience qu’après que son avocat aux Conseils se soit exprimé.

EN DROIT

Le 24 avril 2006, le Gouvernement a exprimé son souhait de parvenir à un règlement amiable dans la présente affaire.

Le 26 avril 2006, le greffe a envoyé aux parties des déclarations en vue d’un règlement amiable de l’affaire.

Le 29 juin 2006, la Cour a reçu du Gouvernement la déclaration suivante :

« Je déclare qu’en vue d’un règlement amiable de l’affaire susmentionnée, le gouvernement français offre de verser à Monsieur Alain GENITEAU la somme de 500 EUR (cinq cents euros) dans les trois mois suivant la date de notification de la décision de la Cour rendue conformément à l’article 37 de la Convention européenne des Droits de l’Homme. Ce versement vaudra règlement définitif de l’affaire.

A défaut de règlement dans ledit délai, le Gouvernement s’engage à verser, à compter de l’expiration de celui-ci et jusqu’au règlement effectif de la somme en question, un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne, augmenté de trois points de pourcentage.

La présente déclaration n’implique de la part du Gouvernement de la France aucune reconnaissance d’une violation de la Convention européenne des Droits de l’Homme en l’espèce. »

Le 7 juillet 2006, la Cour a reçu la déclaration suivante signée par le requérant :

« Je soussigné, Monsieur Alain GENITEAU, note que le gouvernement français est prêt à me verser la somme de 500 EUR (cinq cents euros) en vue d’un règlement amiable de l’affaire ayant pour origine la requête susmentionnée pendante devant la Cour européenne des Droits de l’Homme.

J’accepte cette proposition et renonce par ailleurs à toute autre prétention à l’encontre de la France à propos des faits à l’origine de ladite requête. Je déclare l’affaire définitivement réglée.

La présente déclaration s’inscrit dans le cadre du règlement amiable auquel le Gouvernement et le requérant sont parvenus. »

La Cour prend acte du règlement amiable auquel sont parvenues les parties. A la lumière des circonstances de l’espèce, elle estime que celui-ci s’inspire du respect des droits de l’homme tels que les reconnaissent la Convention et ses protocoles et conclut que le litige a été résolu au sens de l’article 37 § 1 b) de la Convention. Elle n’aperçoit par ailleurs aucun motif d’ordre public justifiant de poursuivre l’examen de la requête (article 37 § 1 in fine de la Convention). En conséquence, il convient de mettre fin à l’application de l’article 29 § 3 de la Convention et de rayer l’affaire du rôle.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Décide de rayer la requête du rôle.

S. Dollé A.B. Baka
Greffière Président