Přehled
Rozhodnutí
TROISIÈME SECTION
DÉCISION PARTIELLE
SUR LA RECEVABILITÉ
de la requête no 9149/03
présentée par Nihat ÖZMEN et autres
contre la Turquie
La Cour européenne des Droits de l’Homme (troisième section), siégeant le 31 août 2006 en une chambre composée de :
MM. B.M. Zupančič, président,
J. Hedigan,
R. Türmen,
C. Bîrsan,
V. Zagrebelsky,
Mme A. Gyulumyan,
M. David Thór Björgvinsson, juges,
et de M. V. Berger, greffier de section,
Vu la requête susmentionnée introduite le 6 février 2003,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
EN FAIT
Les requérants, MM. Nihat Özmen et Yasin Demir, et Mme Şefika Özmen, sont des ressortissants turcs, nés respectivement en 1968, 1972 et 1977. Lors de l’introduction de la requête, ils étaient détenus à la prison de type E d’Erzurum. Ils sont représentés devant la Cour par Me M. Özbekli, avocat à Diyarbakır.
Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les requérants, peuvent se résumer comme suit.
Les 27 mai, 28 mai et 27 octobre 2000 respectivement, Nihat Özmen, Şefika Özmen et Yasin Demir furent placés en garde à vue. Il leur était reproché d’appartenir au Hizbullah et d’avoir participé à des activités en son sein.
Le 3 juin 2000, M. et Mme Özmen, et le 3 novembre 2000, M. Demir furent placés en détention provisoire.
Le 22 mars 1999 et les 7 juin et 24 novembre 2000, le procureur de la République près la cour de sûreté de l’État d’Erzurum inculpa M. Özmen pour appartenance au Hizbullah, homicide volontaire, incendie volontaire, enlèvement et coups et blessures. Il requit sa condamnation en vertu de l’article 146 § 1 du code pénal et de l’article 5 de la loi no 3713 relative à la lutte contre le terrorisme.
Le 7 juin 2000, le procureur de la République inculpa également Mme Özmen pour appartenance et assistance au Hizbullah ainsi que pour homicide volontaire. Il requit sa condamnation en vertu de l’article 146 § 1 du code pénal.
Le 27 novembre 2000, le procureur de la République inculpa M. Demir pour appartenance au Hizbullah et donneur d’ordres en qualité de dirigeant de cette organisation, pour des faits d’homicide, incendie et coups et blessures. Il requit sa condamnation en vertu de l’article 146 § 1 du code pénal.
Le 12 février 2002, la cour de sûreté de l’État reconnut MM. Özmen et Demir coupables d’avoir voulu modifier l’ordre constitutionnel par la violence et les condamna en conséquence à la peine de mort en vertu de l’article 146 § 1 du code pénal. Cette peine fut commuée en une peine de réclusion criminelle à perpétuité en vertu de l’article 59 du code pénal. Elle reconnut Mme Özmen coupable d’appartenance au Hizbullah et la condamna en conséquence à une peine de douze ans et six mois d’emprisonnement.
Le 9 juillet 2002, saisie sur pourvoi, la Cour de cassation statua sans tenir d’audience quant aux cas de MM. Özmen et Demir. Elle tint une audience dans le cas de Mme Özmen, à laquelle participa son avocat. Statuant à la lumière de l’avis du procureur général qui n’aurait pas été communiqué aux requérants, elle confirma leur condamnation.
Le 10 juillet 2002, cet arrêt fut prononcé hors la présence des requérants et de leurs avocats.
Le 6 août 2002, l’arrêt fut versé au dossier de l’affaire près le greffe de la juridiction de première instance.
GRIEF
Invoquant l’article 6 §§ 1 et 3 de la Convention, les requérants allèguent un défaut d’équité de la procédure et une atteinte à leur droit de la défense. A cet égard, ils se plaignent du mode d’administration des preuves ‑ notamment de l’admission de données informatiques comme preuve à charge –, de ne pas avoir été informés des motifs de leur arrestation et de l’absence de communication de l’avis du procureur général près la cour de Cassation.
EN DROIT
1. Invoquant l’article 6 §§ 1 et 3 de la Convention, les requérants se plaignent de l’absence de communication de l’avis du procureur général près la Cour de cassation.
En l’état actuel du dossier, la Cour ne s’estime pas en mesure de se prononcer sur la recevabilité de ce grief et juge nécessaire de communiquer cette partie de la requête au gouvernement défendeur conformément à l’article 54 § 2 b) de son règlement.
2. Invoquant l’article 6 §§ 1 et 3 de la Convention, les requérants se plaignent en outre du mode d’administration des preuves et de ne pas avoir été informés des motifs de leur arrestation.
A cet égard, la Cour rappelle que si l’article 6 § 1 garantit à toute personne le droit à un procès équitable, cette disposition ne réglemente pas l’administration des preuves en tant que telle, et notamment leur admissibilité et leur force probante, questions relevant essentiellement du droit interne (voir Schenk c. Suisse, arrêt du 12 juillet 1988, série A no 140, p. 29, §§ 46 et suivants). En outre, elle relève que le grief des requérants est formulé de manière générale et n’apparaît nullement étayé. Il s’ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.
Quant au grief des requérants tiré de l’absence d’information au sujet des motifs de leur arrestation, la Cour l’examinera sous l’angle de l’article 5 § 2 de la Convention. A cet égard, elle constate que les requérants ont été arrêtés et placés en garde à vue respectivement les 27 mai, 28 mai et 27 octobre 2000. Or, la présente requête a été introduite le 6 février 2003, soit plus de six mois plus tard. Il s’ensuit que ce grief est tardif et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.
Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,
Ajourne l’examen du grief des requérants tiré de l’absence de communication de l’avis du procureur général près la Cour de cassation ;
Déclare la requête irrecevable pour le surplus.
Vincent Berger Boštjan M. Zupančič
Greffier Président