Přehled

Text rozhodnutí
Datum rozhodnutí
6.7.2006
Rozhodovací formace
Významnost
3
Číslo stížnosti / sp. zn.

Rozsudek

TROISIÈME SECTION

AFFAIRE ROSCA c. ROUMANIE

(Requête no 75129/01)

ARRÊT

(Règlement amiable)

STRASBOURG

6 juillet 2006

Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.


En l’affaire Rosca c. Roumanie,

La Cour européenne des Droits de l’Homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

MM. B.M. Zupančič, président,

L. Caflisch,

C. Bîrsan,

V. Zagrebelsky,

Mme A. Gyulumyan,

M. E. Myjer,

Mme I. Ziemele, juges,

et de M. V. Berger, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 15 juin 2006,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 75129/01) dirigée contre la Roumanie et dont un ressortissant de cet Etat,
M. Sorinel-Cristian Rosca (« le requérant »), a saisi la Cour le 22 août 2001 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Le requérant est représenté par Me Adina Iulia Hasnas, avocate à Bucarest. Le gouvernement roumain (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, Mme B. Rămăşcanu, du ministère des Affaires étrangères.

3. Le requérant alléguait notamment une violation des articles 6 § 1 et 8 de la Convention en raison de sa condamnation par des juridictions militaires alors qu’il est civil, ainsi que de l’illégalité des écoutes de ses communications téléphoniques et de leur utilisation comme moyen de preuve dans la procédure pénale.

4. Par une décision du 17 novembre 2005, la Cour (troisième section) a déclaré la requête partiellement recevable.

5. Le 2 février 2006, après un échange de correspondance, le greffier a proposé aux parties la conclusion d’un règlement amiable au sens de l’article 38 § 1 b) de la Convention. Les 28 mars 2006 et 30 mars 2006 respectivement, le requérant et le Gouvernement ont présenté des déclarations formelles d’acceptation du règlement amiable de l’affaire.

EN FAIT

6. Le requérant est né en 1970 et réside à Bucarest.

7. Il était à l’époque des faits fonctionnaire civil de l’Autorité aéronautique civile de Roumanie, chargé notamment de délivrer des autorisations de survol et d’atterrissage pour les aéronefs qui traversaient l’espace aérien roumain.

8. Le 13 mai 1995, par une ordonnance du procureur, le requérant fut placé en détention provisoire et accusé de complicité de contrebande et de destruction d’équipements de télécommunications. Le parquet près la cour militaire d’appel de Bucarest le soupçonnait d’avoir autorisé l’atterrissage sur l’aéroport militaire d’Otopeni des avions transportant des cigarettes de contrebande. Il fut également accusé d’avoir endommagé certaines bases de données informatiques afin d’effacer les preuves.

9. Le requérant contesta l’ordonnance du parquet. Par un arrêt du 3 juin 1998, la cour militaire d’appel accueillit sa contestation, mais il ne fut libéré que le lendemain.

10. Par un réquisitoire du parquet militaire du 23 juillet 1998, le requérant et dix-huit autres inculpés, dont de nombreux militaires, furent renvoyés devant le tribunal militaire territorial de Bucarest pour faux en écritures, association de malfaiteurs et contrebande.

11. Selon le parquet, les faits s’étaient déroulés de la manière suivante. Dans la nuit du 23 au 24 mars 1998, suivant un plan préétabli, un avion affrété par l’un des inculpés, transportant une grande quantité de cigarettes, avait atterri sur l’aéroport militaire d’Otopeni. Les cigarettes avaient ensuite été chargées dans des camions et acheminées dans des dépôts situés dans la banlieue de Bucarest.

12. La réussite de l’opération avait décidé les inculpés à la réitérer dans les mêmes conditions pendant la nuit du 16 au 17 avril 1998.

13. Au cours de ces opérations, le service roumain de renseignements avait intercepté de nombreuses conversations téléphoniques entre plusieurs coïnculpés, dont le requérant.

14. Le requérant avait donné, à ces deux occasions, l’autorisation de survol et d’atterrissage des avions.

15. Le 18 février 1999, le tribunal militaire territorial de Bucarest condamna le requérant à une peine de neuf ans de prison pour association de malfaiteurs, complicité de contrebande, faux, usage de faux et destruction des équipements de télécommunication.

16. A une date non précisée, le parquet et le requérant firent appel de ce jugement. Le parquet demandait l’aggravation des peines prononcées à l’encontre de tous les inculpés.

17. Le requérant demandait son acquittement au motif que les erreurs commises dans le cadre de ses attributions ne constituaient pas des infractions. Il alléguait aussi l’illégalité des écoutes téléphoniques auxquelles il avait été soumis et demandait le renvoi du dossier au parquet militaire pour la reprise de l’instruction.

18. Par une décision du 8 juin 2000, la cour militaire d’appel rejeta l’appel du parquet comme mal fondé. En revanche, elle fit droit à l’appel du requérant dans sa partie concernant le quantum de la peine qu’elle ramena à six ans de prison.

19. Le requérant et le parquet militaire près la cour d’appel formèrent un recours contre cette décision. Soulignant la gravité des infractions commises, le parquet contestait la réduction de la durée de la peine prononcée à l’encontre du requérant. Le requérant demandait son acquittement, réitérant les arguments présentés devant les deux premières juridictions.

20. Par un arrêt définitif du 26 février 2001, la Cour suprême de justice accueillit les recours. Elle confirma le bien fondé de la condamnation du requérant pour complicité dans l’opération de contrebande dans la nuit du 16 au 17 avril 1998, faux, usage de faux et destruction des équipements de télécommunications. S’agissant des autres infractions retenues à la charge du requérant, la Cour suprême estima que l’association de malfaiteurs et la complicité à l’opération de contrebande dans la nuit du 23 au 24 mars 1998 n’étaient pas prouvées et, par conséquent, relaxa le requérant de ces chefs. Cependant, elle porta la peine principale à huit ans de prison.

21. Par un décret du 18 juillet 2003, publié au Journal officiel le 22 juillet 2003, le président de la République accorda au requérant sa grâce, le dispensant de l’exécution du restant de la peine.

EN DROIT

22. Le 30 mars 2006, la Cour a reçu du Gouvernement la déclaration suivante :

« (...) Le gouvernement roumain offre de verser à M. Sorinel-Cristian Rosca, à titre gracieux, la somme de 7 500 euros en vue d’un règlement amiable de l’affaire ayant pour origine la requête susmentionnée pendante devant la Cour européenne des Droits de l’Homme.

Cette somme couvrira tout préjudice matériel et moral ainsi que les frais et dépens et sera payée dans les trois mois suivant la date de la notification de l’arrêt de la Cour rendu conformément à l’article 39 de la Convention européenne des Droits de l’Homme. A défaut de règlement dans ledit délai, le Gouvernement s’engage à verser, à compter de l’expiration de celui-ci et jusqu’au règlement effectif de la somme en question, un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne, augmenté de trois points de pourcentage. Ce versement vaudra règlement définitif de l’affaire.

En outre, le Gouvernement s’engage à ne pas demander le renvoi de l’affaire à la Grande Chambre conformément à l’article 43 § 1 de la Convention. »

23. Le 28 mars 2006, la Cour a reçu la déclaration suivante, signée par le requérant et son avocate :

« Je (...) note que le gouvernement roumain est prêt à verser à M. SorinelCristian Rosca, à titre gracieux, la somme de 7 500 euros en vue d’un règlement amiable de l’affaire ayant pour origine la requête susmentionnée pendante devant la Cour européenne des Droits de l’Homme.

Cette somme couvrira tout préjudice matériel et moral ainsi que les frais et dépens et sera payée dans les trois mois suivant la date de la notification de l’arrêt de la Cour rendu conformément à l’article 39 de la Convention européenne des Droits de l’Homme. A compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au règlement effectif de la somme en question, il sera payé un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne, augmenté de trois points de pourcentage.

J’accepte cette proposition et renonce par ailleurs à toute autre prétention à l’encontre de la Roumanie à propos des faits à l’origine de ladite requête. Je déclare l’affaire définitivement réglée.

La présente déclaration s’inscrit dans le cadre du règlement amiable auquel le Gouvernement et le requérant sont parvenus.

En outre, je m’engage à ne pas demander, après le prononcé de l’arrêt, le renvoi de l’affaire à la Grande Chambre conformément à l’article 43 § 1 de la Convention. »

24. La Cour prend acte du règlement amiable auquel sont parvenues les parties (article 39 de la Convention). Elle est assurée que ce règlement s’inspire du respect des droits de l’homme tels que les reconnaissent la Convention ou ses Protocoles (articles 37 § 1 in fine de la Convention et 62 § 3 du règlement).

25. Partant, il convient de rayer l’affaire du rôle.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Décide de rayer l’affaire du rôle ;

2. Prend acte de l’engagement des parties de ne pas demander le renvoi de l’affaire à la Grande Chambre.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 6 juillet 2006 en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Vincent Berger Boštjan M. Zupančič
Greffier Président