Přehled

Text rozhodnutí
Datum rozhodnutí
23.5.2006
Rozhodovací formace
Významnost
3
Číslo stížnosti / sp. zn.

Rozhodnutí

DEUXIÈME SECTION

DÉCISION PARTIELLE

SUR LA RECEVABILITÉ

de la requête no 28239/03
présentée par Hurşit YILDIZ
contre la Turquie

La Cour européenne des Droits de l’Homme (deuxième section), siégeant le 23 mai 2006 en une chambre composée de :

MM. J.-P. Costa, président,
I. Cabral Barreto,
R. Türmen,
M. Ugrekhelidze,
Mmes A. Mularoni,
E. Fura-Sandström,
M. D. Popović, juges,
et de Mme S. Dollé, greffière de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 26 août 2003,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Hurşit Yıldız, est un ressortissant turc, né en 1959 et résidant à Antalya. Il est représenté devant la Cour par Me M. İşeri, avocat à Izmir.

A. Les circonstances de l’espèce

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par le requérant, peuvent se résumer comme suit.

Arrêté le 2 août 1994, le requérant fut placé en détention provisoire le 3 août 1994 par le juge.

Le rapport médical du 3 août 1994 indiqua la présence d’ecchymoses sur le corps du requérant. Le médecin ordonna une incapacité de travail de deux jours.

Dans sa déclaration écrite du 7 novembre 1994 adressée à la cour de sûreté de l’État d’Izmir, le requérant précisa avoir subi des mauvais traitements lors de sa garde à vue.

Le 1er mars 1995, le requérant fut mis en liberté provisoire.

Par un arrêt du 31 octobre 1995, passé en force de chose jugée le 7 novembre 1995, la cour de sûreté de l’État acquitta le requérant.

Le 24 septembre 1996, sur le fondement de la loi no 466, le requérant introduisit devant la cour d’assises d’Antalya un recours en dommages-intérêts pour sa détention provisoire.

Le 1er février 2000, la cour d’assises rejeta cette demande au motif que le requérant n’avait pas introduit son action dans les trois mois à compter de l’arrêt d’acquittement.

Dans son avis du 12 décembre 2000, le procureur général près la Cour de cassation demanda la cassation de l’arrêt du 1er février 2000 au motif que le délai de trois mois commence à courir à partir de la date à laquelle la décision est notifiée au requérant. Cette juridiction n’avait pas fait une telle vérification.

Par un arrêt du 18 janvier 2001, sur le fondement du motif invoqué par le procureur général, la Cour de cassation cassa l’arrêt et demanda à la première juridiction de procéder à une vérification en ce sens.

Le 20 mars 2001, à la demande de la cour d’assises d’Antalya du 14 février 2001, la cour de sûreté de l’État d’Izmir précisa que l’arrêt d’acquittement n’avait pas été notifié au requérant.

Par un arrêt du 10 mai 2001, la cour d’assises d’Antalya débouta le requérant au motif que l’arrêt d’acquittement n’avait pas encore été notifié au requérant et qu’il lui était loisible d’intenter de nouveau son action une fois que ledit arrêt lui serait notifié.

Le 19 septembre 2005, le requérant se pourvu en cassation en faisant valoir que l’arrêt du 10 mai 2001 ne lui avait pas été notifié conformément à la loi et qu’il en avait pris connaissance le 15 septembre 2005.

La procédure est pendante devant la Cour de cassation.

B. Le droit interne pertinent

D’après l’article 1 de la loi no 466 « sur l’octroi d’indemnités aux personnes illégalement arrêtées ou injustement détenues », sera dédommagée par l’État toute personne qui, entre autres, a été « arrêtée ou placée en détention dans des conditions et circonstances non conformes à la Constitution et aux lois » en vigueur.

GRIEFS

Invoquant les articles 3 et 13 de la Convention, le requérant prétend avoir subi des mauvais traitements lors de sa garde à vue. Il soutient l’absence de voie de recours interne pour faire valoir ce grief.

Invoquant l’article 6 de la Convention, le requérant se plaint de la durée de la procédure engagée devant la cour d’assises d’Antalya.

EN DROIT

1. Le requérant se plaint de la durée de la procédure engagée devant la cour d’assises d’Antalya. Il invoque l’article 6 § 1 de la Convention ainsi libellé en sa partie pertinente :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »

En l’état actuel du dossier, la Cour ne s’estime pas en mesure de se prononcer sur la recevabilité de ce grief et juge nécessaire de communiquer cette partie de la requête au gouvernement défendeur conformément à l’article 54 § 2 b) de son règlement.

2. Le requérant prétend avoir subi des mauvais traitements lors de sa garde à vue. Il invoque les articles 3 et 13 de la Convention ainsi libellé :

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (...) Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. »

En l’espèce, la Cour relève que le requérant n’a pas déposé de plainte pour mauvais traitements contre les policiers responsables de sa garde à vue. Le 7 novembre 1994, il a fait valoir devant la cour de sûreté de l’État d’Izmir qu’il avait subi des mauvais traitements lors de sa garde à vue. La Cour constate que, dans son arrêt du 31 octobre 1995 passé en force de chose jugée le 7 novembre 1995, la cour de sûreté de l’État a acquitté le requérant sans se prononcer sur le grief tiré de l’article 3.

Dans les circonstances de l’affaire, le requérant aurait dû se rendre compte de l’inefficacité des voies de recours internes dès le 31 octobre 1995 ou au plus tard le 7 novembre 1995. Il aurait dû en conséquence introduire sa requête dans le délai de six mois à partir de cette date, soit au plus tard le 7 mai 1996, alors qu’il ne l’a fait que le 26 août 2003, soit plus de sept ans après. La Cour ne relève par ailleurs aucune circonstance particulière pouvant interrompre ce délai de six mois.

Il s’ensuit que ce grief est tardif et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Ajourne l’examen du grief du requérant tiré de la durée de la procédure suivie devant la cour d’assises d’Antalya (article 6 § 1) ;

Déclare la requête irrecevable pour le surplus.

S. Dollé J.-P. Costa
Greffière Président