Přehled
Rozsudek
PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE KOZYRIS ET AUTRES c. GRÈCE
(Requête no 73669/01)
ARRÊT
STRASBOURG
10 février 2005
DÉFINITIF
10/05/2005
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Kozyris et autres c. Grèce,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (première section), siégeant en une chambre composée de :
MM. L. Loucaides, président,
C.L. Rozakis,
Mme F. Tulkens,
M. P. Lorenzen,
Mme N. Vajić,
MM. D. Spielmann,
S.E. Jebens, juges,
et de M. S. Nielsen, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 20 janvier 2005,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1. A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 73669/01) dirigée contre la République hellénique par cent cinquante et un ressortissants de cet Etat (« les requérants »), dont les noms figurent ci-joint en annexe, qui ont saisi la Cour le 1er août 2001 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »).
2. Les requérants sont représentés par Me N. Anagnostopoulos, avocat au barreau d’Athènes. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») est représenté par les délégués de son agent, MM. S. Spyropoulos, assesseur auprès du Conseil Juridique de l’Etat, et K. Georgiadis, auditeur auprès du Conseil Juridique de l’Etat.
3. Les requérants se plaignaient notamment, sous l’angle de l’article 6 § 1 de la Convention, de la durée d’une procédure administrative.
4. La requête a été attribuée à la première section de la Cour (article 52 § 1 du règlement). Au sein de celle-ci, la chambre chargée d’examiner l’affaire (article 27 § 1 de la Convention) a été constituée conformément à l’article 26 § 1 du règlement.
5. Par une décision du 2 octobre 2003, la Cour a déclaré la requête partiellement recevable.
6. Tant les requérants que le Gouvernement ont déposé des observations écrites sur le fond de l’affaire (article 59 § 1 du règlement).
EN FAIT
7. La présente requête porte sur les procédures engagées par les requérants, militaires à la retraite ou leurs ayants droit, en vue d’obtenir une prime de réajustement du montant de leurs pensions.
8. Ces demandes furent, dans un premier stade, rejetées par décisions du conseil d’administration de la Caisse d’Entraide de l’Armée (Ταμείο Αλληλοβοηθείας Στρατού).
9. Le 24 octobre 1989, les requérants saisirent le tribunal administratif de première instance d’Athènes d’un recours contre les décisions susmentionnées.
10. Le 31 octobre 1990, le tribunal rejeta leur action comme étant dénuée de fondement (jugements nos 13812/1990, 13813/1990 et 13815/1990).
11. Le 11 avril 1991, les requérants interjetèrent appel des jugements susmentionnés.
12. Le 1er juillet 1994, la cour administrative d’appel rejeta les appels comme étant dénués de fondement (jugements nos 2001/1994, 2002/1994 et 2004/1994).
13. Le 13 février 1995, les requérants se pourvurent en cassation.
14. Le 3 juin 1999, le Parlement grec adopta la loi no 2721/1999 qui excluait le pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat pour les litiges ayant un objet financier inférieur à 500 000 drachmes et prononçait l’annulation de toute la procédure judiciaire y afférente éventuellement pendante devant cette juridiction. L’article 52 § 2 de cette loi prévoyait toutefois que les personnes s’étant déjà pourvues en cassation disposaient d’un délai de soixante jours à compter du 16 septembre 1999 (c’est-à-dire à partir de la date de publication de la loi), pour faire valoir le fait que le litige avait pour elles d’importantes répercussions financières qui justifieraient la continuation de la procédure. Les requérants ne se prévalurent pas de cette possibilité.
15. A une date non précisée, les requérants furent informés que le 5 février 2001, par décision du président de la première chambre du Conseil d’Etat, les procédures portant sur leurs pourvois en cassation contre les jugements nos 2001/1994, 2002/1994 et 2004/1994 de la cour administrative d’appel avaient été annulées en application des dispositions de la loi no 2721/1999 (décisions nos 427, 428 et 430).
EN DROIT
I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
16. Les requérants allèguent que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
«Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...)»
17. Le Gouvernement s’oppose à cette thèse. Il affirme que l’affaire présentait une certaine complexité, liée au nombre des actions similaires dont furent saisis les tribunaux grecs. Il se réfère en outre à plusieurs grèves des avocats du pays, événements qui échappent au contrôle des tribunaux. Il ajoute que la durée de la procédure devant le Conseil d’Etat ne doit pas être prise en considération, car l’affaire n’a pas été examinée sur le fond.
18. La période à considérer a débuté le 24 octobre 1989, avec la saisine du tribunal administratif d’Athènes et s’est terminée le 5 février 2001, avec les décisions du Conseil d’Etat prononçant l’annulation de l’instance. Elle a donc duré onze ans, trois mois et douze jours, pour trois degrés de juridiction.
19. La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par sa jurisprudence, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement des requérantes et celui des autorités compétentes ainsi que l’enjeu du litige pour les intéressés (voir, parmi beaucoup d’autres, Frydlender c. France [GC], no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII).
20. La Cour a traité à maintes reprises d’affaires soulevant des questions semblables à celle du cas d’espèce et a constaté la violation de l’article 6 § 1 de la Convention (voir l’affaire Frydlender précitée).
21. Après avoir examiné tous les éléments qui lui ont été soumis, la Cour considère que le Gouvernement n’a exposé aucun fait ni argument pouvant mener à une conclusion différente dans le cas présent. Compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime qu’en l’espèce la durée de la procédure litigieuse est excessive et ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable ».
Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
22. Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A. Dommage
23. Les requérants réclament 3 000 euros (EUR) chacun au titre du préjudice moral qu’ils auraient subi.
24. Le Gouvernement affirme qu’un constat de violation constituerait en soi une satisfaction équitable suffisante.
25. La Cour estime que les requérants ont subi un tort moral certain. Statuant en équité, comme le veut l’article 41 de la Convention, elle leur accorde conjointement 75 500 EUR à ce titre, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt.
B. Frais et dépens
26. Les requérants demandent également 3 400 EUR chacun pour les frais et dépens encourus devant les juridictions internes et la Cour. Ils ne produisent aucune facture ou note d’honoraires.
27. Le Gouvernement affirme qu’il n’existe aucun lien de causalité entre les frais encourus devant les juridictions internes et la durée de la procédure. Il estime que la somme globale allouée aux requérants pour les besoins de leur représentation devant la Cour ne saurait dépasser 1 000 EUR.
28. Selon la jurisprudence constante de la Cour, l’allocation de frais et dépens au titre de l’article 41 présuppose que se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et, de plus, le caractère raisonnable de leur taux (Iatridis c. Grèce (satisfaction équitable) [GC], no 31107/96, § 54, CEDH 2000-XI).
29. S’agissant des frais et dépens encourus en Grèce, la Cour a déjà jugé que la longueur d’une procédure pouvait entraîner une augmentation des frais et dépens du requérant devant les juridictions internes et qu’il convient donc d’en tenir compte (voir, entre autres, Capuano c. Italie, arrêt du 25 juin 1987, série A no 119-A, p. 15, § 37). Toutefois, dans le cas d’espèce, la Cour note que les requérants ne produisent aucune facture en ce qui concerne les frais engagés devant les juridictions saisies. Il y a donc lieu de rejeter cette partie de leurs prétentions. En ce qui concerne les frais exposés pour les besoins de la représentation des requérants devant elle, la Cour observe que les prétentions de ces derniers ne sont ni détaillées ni accompagnées des justificatifs nécessaires. Il convient donc d’écarter leur demande sur ce point également.
C. Intérêts moratoires
30. La Cour juge approprié de baser le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1. Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
2. Dit
a) que l’Etat défendeur doit verser conjointement aux requérants, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 75 500 EUR (soixante-quinze mille cinq cents euros) pour dommage moral, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt ;
b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
3. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 10 février 2005 en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Søren Nielsen Loukis Loucaides
Greffier Président
Liste des requérants
- Georgios KOZYRIS
- Vassilios PETROPOULOS
- Nikolaos LAZARIDIS
- Grigorios KYTRIDIS
- Georgios MALLIOPOULOS
- Antonios POLYTHODORAKIS
- Panagiotis MANTAKOS
- Stavros RIZOS
- Kiki BOUZA
- Georgios DIAKOUMAKOS
- Ioannis MASTAGGAKIS
- Nikolaos PANTAZOPOULOS
- Dimitrios PANTAZOPOULOS
- Anastasios ORPHANOUDAKIS
- Georgios ARAMBOS
- Ioannis BEKIARIS
- Georgios PAPAKONSTANTINOU
- Ioannis POULAKAS
- Konstantinos FROUSSOS
- Androklis ZERVAKIS
- Leonidas SARANTIS
- Nikolaos KIOUROS
- Georgios VLACHOS
- Stavros TSIONAKAS
- Ioannis CHITIKOUDIS
- Theodoros LOUKIDIS
- Menelaos AFENDRIS
- Athanasios KOUTSODIMITROPOULOS
- Kyriakos KATAGEORGOS
- Eleftherios ZIDROS
- Athanasios KONSTANTINIDIS
- Spyridon FLESSAS
- Panagis CHLOROS
- Georgios TSAKIRIS
- Georgios GANTZIAS
- Georgios RAPATZIKOS
- Vassilios DEMESTICHAS
- Panagiotis KALOUDIS
- Alexandros MITROPOULOS
- Konstantinos KOUTROUBAS
- Christos PAPIAS
- Nikolaos KATSIKAS
- Stylianos ANDROULAKIS
- Dimitrios STEPHANIS
- Eleftherios TSAÏNIS
- Apostolos PATSOPOULOS
- Alexandros KATSIKARIS
- Theodoros ROMANIDIS
- Anastasios SPYROPOULOS
- Christos REKLITIS
- Dimitrios PAPACHARALAMBOUS
- Konstantinos NIKOLETOPOULOS
- Alexandros SIDIROPOULOS
- Georgios ARCHONTIS
- Spyridon SERELEAS
- Nikolaos GALANIS
- Christos MAVROPOULOS
- Sotirios SGOUMBOPOULOS
- Georgios GIAKOUMAKOS
- Vassiliki VASSILIOU
- Dimitrios PAPADOPOULOS
- Vassilios AGGELOPOULOS
- Chrysanthos PAPPAS
- Vassilios KOMIOTIS
- Petros VERGYRIS
- Sotirios MANTZOUNIS
- Ioannis VELENTZAS
- Savvas VAFIADIS
- Pavlos-Paikos TSOUMIS
- Panagiotis KARAGIANNIS
- Stavros KATSIGIANNIS
- Georgios SPANOS
- Pantelis AVRAMIDIS
- Panagiotis STATHAKOPOULOS
- Adonis-Theofanis GEROMITSOS
- Georgios PAPAZOGLOU
- Ioulios BANOS
- Periklis KORKONTZELOS
- Fraggiskos PETRIDIS
- Spyridon KATSOULIS
- Spyridon DOUIS
- Georgios SPYROPOULOS
- Spyridon SARAKINOS
- Konstantinos DIAMANTIDIS
- Kleopatra EMMANOUILIDOU
- Aggeliki EMMANOUILIDOU
- Panagiotis KANELLEAS
- Georgios DIMITRAKAKIS
- Napoleon ALEXIOU
- Evaggelos LAPPAS
- Christos PAPACHRISTOU
- Konstantinos PAPOUTSIS
- Panagiotis CHRONAS
- Ioannis NIKOLINAS
- Panagiotis POLYMENEAS
- Nikolaos STAVROPOULOS
- Dimitrios CHATZIVANTSIDIS
- Ioannis KOSTOULAS
- Christos CHAZIAGGELIDIS
- Ilias BAKAS
- Athanasios PEPELAS
- Nikolaos KIOUSIS
- Dimitrios BALASIS
- Dimitrios STAVREAS
- Dionysios KAILAS
- Ioannis ZAMANIS
- Dimitrios DARLASIS
- Christos NIKOLENTZOS
- Konstantinos TZIANETOPOULOS
- Theocharis IOANNIDIS
- Georgios PAPADAS
- Stavros PAPADOPOULOS
- Georgios ZABARAS
- Charalambos DROSOS
- Margaritis STAVRIDIS
- Efstathios TRAVLOS
- Konstantinos BOBOTAS
- Georgios MICHALAKIS
- Periklis GIANNOUSIS
- Christos VAIKAMIS
- Dimitrios POLYMEROS
- Konstantinos SOUKOS
- Maria SIGANOU
- Efstathios STYLIDIS
- Nikolaos SYRIGOS
- Tilemachos KATSARAS
- Efstratios DOMENIKOS
- Nikolaos KARAMINAS
- Andreas SOURANIS
- Michaïl BAKAS
- Vassilios PSYCHOGIANNIS
- Timotheos ROUSELATOS
- Ioannis STAMOULIS
- Evaggelos PETROU
- Christos TRIGGIDIS
- Anna TSALTA
- Nikolaos TSALTAS
- Georgios TSALTAS
- Dimitrios TAGGIS
- Nikolaos MAVROGIANNIS
- Emmanouil CHALKIADAKIS
- Georgios TAGARIS
- Charalambos PERIOUNOKIS
- Kosmas ATHANASIOU
- Panagiotis DIMITRIOU
- Konstantinos KATSAÏTIS
- Emmanouil MOULAKAKIS
- Athanasios KOUTSIAS
- Evaggelos GRAMMATIKOPOULOS
- Ilias ARGYRIS
- Vassilios TATSIOPOULOS