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Rozhodnutí
QUATRIÈME SECTION
DÉCISION
SUR LA RECEVABILITÉ
de la requête n° 37842/97
présentée par Casimira SILVA GOMES et autres
contre le Portugal
La Cour européenne des Droits de l’Homme (quatrième section), siégeant le 16 mars 2000 en une chambre composée de
M. M. Pellonpää, président,
M. G. Ress,
M. A. Pastor Ridruejo,
M. L. Caflisch,
M. J. Makarczyk,
M. I. Cabral Barreto,
Mme N. Vajić, juges,
et de M. V. Berger, greffier de section,
Vu la requête susmentionnée introduite devant la Commission européenne des Droits de l’Homme le 10 juin 1997 et enregistrée le 19 septembre 1997,
Vu l’article 5 § 2 du Protocole n° 11 à la Convention, qui a transféré à la Cour la compétence pour examiner la requête,
Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par les requérants,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
EN FAIT
Les requérants, dont la liste figure en annexe, sont tous des ressortissants portugais. Ils sont représentés devant la Cour par Me Varela de Matos et Me Cristina Palma, avocats au barreau de Lisbonne.
Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.
Les requérants étaient salariés de l’association « C.S. », qui assurait la gestion des restaurants et cantines de la société « S. S.A. ». En 1991, celle-ci décida de donner la concession de la gestion de ses restaurants et cantines à une autre société « E. S.A. », les requérants ayant alors fait l’objet d’un licenciement collectif (despedimento colectivo). Ceci a été à l’origine de plusieurs procédures, en particulier d’une procédure conservatoire en suspension du licenciement et d’une action en annulation de ce même licenciement.
Le 28 octobre 1993, les requérants introduisirent devant le tribunal administratif (Tribunal administrativo do círculo) de Lisbonne une action en responsabilité
extra-contractuelle de l’Etat, fondée sur le décret-loi n° 48051 du 21 novembre 1967, concernant la durée excessive des deux procédures susmentionnées.
Par un jugement rendu sans audience le 12 mai 1994, le tribunal s’estima incompétent ratione materiae pour examiner l’affaire.
Le 26 mai 1994, les requérants firent appel de ce jugement devant la Cour suprême administrative (Supremo Tribunal Administrativo). Après la présentation des mémoires des parties, le dossier fut transmis à cette juridiction le 11 novembre 1994. Par un arrêt du 7 mars 1995, la Cour suprême administrative annula la décision attaquée et ordonna la poursuite de la procédure. Le dossier fut transmis au tribunal administratif de Lisbonne le 11 avril 1995.
Le 18 juin 1995, les requérants demandèrent à être dispensés du paiement des frais relatifs à une copie certifiée concernant certains documents. Par une ordonnance du 16 octobre 1995, le juge rejeta cette demande. Le 17 novembre 1995, les requérants interjetèrent un recours contre cette ordonnance devant la Cour suprême administrative. Celle-ci, par un arrêt du 26 septembre 1996, annula la décision attaquée et ordonna au tribunal a quo d’accorder ladite dispense.
Par une ordonnance du 14 novembre 1996, le juge invita les requérants à produire les documents relatifs aux procédures en cause. Le 12 décembre 1996, les requérants produisirent certains de ces documents. Le 28 février 1997, ils demandèrent une prorogation du délai imparti afin de produire les documents restants. Ils exposèrent ne pas encore avoir obtenu lesdits documents de la part du tribunal du travail de Lisbonne. Les requérants demandèrent encore, pour les mêmes motifs, une autre prorogation du délai, en date du 4 juillet 1997. Ils produisirent les documents en cause le 11 juillet 1997.
Le 15 septembre 1997, le juge ordonna de porter les documents en cause à la connaissance de la partie adverse.
Le 30 mars 1998, certains autres documents furent versés au dossier.
Par un jugement rendu sans audience le 4 août 1998, le tribunal débouta les requérants de leurs prétentions.
GRIEF
Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, les requérants se plaignent de la durée de la procédure en responsabilité extra-contractuelle de l’Etat.
EN DROIT
Les requérants se plaignent de la durée de la procédure. Ils invoquent l’article 6 § 1 de la Convention, lequel dispose notamment :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (…) dans un délai raisonnable, par un tribunal (…) qui décidera (…) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (…) ».
La période à apprécier au regard de cette disposition a débuté le 28 octobre 1993 avec l’introduction de la demande et s’est terminée le 4 août 1998 par le jugement du tribunal administratif de Lisbonne. La durée en cause est donc de quatre ans et neuf mois.
Le Gouvernement soutient qu’une telle durée n’a pas dépassé le délai raisonnable. Il souligne la complexité de l’affaire, qui serait révélée par le fait que la Cour suprême administrative s’est vu saisie d’une question préalable concernant la compétence ratione materiae des juridictions administratives. Il argue également du comportement des requérants, qui ont provoqué plusieurs retards dans le déroulement de la procédure.
Les requérants contestent ces arguments et soulignent que la plupart des retards vérifiés sont imputables au tribunal administratif de Lisbonne.
La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure doit s’apprécier suivant les circonstances de la cause et à l’aide des critères suivants : la complexité de l’affaire, le comportement du requérant et celui des autorités saisies de l’affaire (arrêt Silva Pontes c. Portugal du 23 mars 1994, série A n° 286-A, p. 15, § 39).
En outre, seules les lenteurs imputables à l’Etat peuvent amener à conclure à l’inobservation du « délai raisonnable » (arrêt Ciricosta et Viola c. Italie du 4 décembre 1995, série A n° 337-A, p. 10, § 28).
La Cour relève d’abord que l’affaire présentait une certaine complexité.
Elle observe ensuite que les requérants ont été à l’origine de certains retards dans le déroulement de la procédure, qui n’apparaissent cependant pas comme significatifs.
S’agissant du comportement des autorités compétentes, la Cour relève que les quelques retards imputables au tribunal administratif de Lisbonne ne sont pas décisifs, au vu de la durée globale de la procédure.
Eu égard également au fait que plusieurs juridictions, dont la Cour suprême administrative à deux reprises, ont eu à connaître du litige, la Cour estime que la durée litigieuse ne se révèle pas importante au point que l’on puisse conclure à une violation de l’article 6 § 1 de la Convention.
Il s’ensuit que la requête doit être rejetée comme étant manifestement mal fondée, au sens de l’article 35 § 3 de la Convention.
Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,
DÉCLARE LA REQUÊTE IRRECEVABLE.
Vincent Berger Matti Pellonpää
Greffier Président