Přehled
Rozhodnutí
SUR LA RECEVABILITE
de la requête No 19222/91
présentée par Luciano RAPOTEZ
contre l'Italie
__________
La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième
Chambre), siégeant en chambre du conseil le 10 février 1993
en présence de
MM. S. TRECHSEL, Président de la Deuxième Chambre
G. JÖRUNDSSON
A. WEITZEL
J.C. SOYER
H.G. SCHERMERS
H. DANELIUS
Mme G.H. THUNE
MM. F. MARTINEZ
J.C. GEUS
M. K. ROGGE, Secrétaire de la Deuxième Chambre ;
Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de
l'Homme et des Libertés fondamentales ;
Vu la requête introduite le 26 juillet 1991 par Luciano Rapotez
contre l'Italie et enregistrée le 18 décembre 1991 sous le No de
dossier 19222/91 ;
Vu la décision de la Commission du 13 mai 1992 de porter la
requête à la connaissance du Gouvernement défendeur ;
Vu les observations présentées par le Gouvernement défendeur le
20 juillet 1992 et les observations en réponse présentées par le
requérant le 8 octobre 1992 ;
Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la
Commission ;
Après avoir délibéré,
Rend la décision suivante :
EN FAIT
Le requérant, Luciano Rapotez, est un ressortissant italien, né
en 1920 et résidant à Udine (Italie).
Les faits de la cause peuvent être sommairement résumés comme
suit :
Le requérant fut arrêté le 28 janvier 1955 et accusé d'être l'un
des co-auteurs d'un triple assassinat commis le 15 septembre 1946 dans
la région de Trieste. Par jugement rendu par la cour d'assises de
Trieste le 30 août 1957, le requérant fut acquitté au bénéfice du doute
et remis en liberté.
Le 2 mars 1961, la cour d'assises d'appel de Trieste l'acquitta
purement et simplement de toute accusation. Le 4 octobre 1962,
rejetant le pourvoi présenté par le ministère public, la Cour de
cassation confirma l'arrêt du 2 mars 1961.
Le requérant dut alors émigrer hors d'Italie ; de ce fait, sa
famille aurait été dispersée.
Par citation notifiée le 5 juin 1979, le requérant, qui affirmait
avoir avoué son crime après avoir été soumis à la torture et à des
mauvais traitements lors de son interrogatoire par la police, assigna
le ministère de l'Intérieur devant le tribunal de Trieste pour que soit
établie la responsabilité de l'Etat en raison des dommages que lui
auraient causés certains fonctionnaires de police et il demanda
réparation des préjudices moraux et matériels subis de ce fait lors de
sa garde à vue.
Par jugement du 13 mars 1981, déposé au greffe le
21 avril 1981, le tribunal civil de Trieste, statuant en chambre du
conseil, rejeta la demande du requérant et le condamna au paiement des
frais et dépens du procès.
Par un arrêt du 19 mars 1982, déposé au greffe le 13 avril 1982,
la cour d'appel de Trieste confirma en substance le jugement du
13 mars 1981.
Par un arrêt du 12 juin 1987, déposé au greffe le 8 janvier 1988,
la Cour de cassation cassa l'arrêt de la cour d'appel de Trieste et
renvoya l'affaire devant la cour d'appel de Venise.
L'examen de l'affaire fut repris par la cour d'appel de Venise
suite à une citation notifiée par le requérant le 24 juin 1988.
La cour d'appel de Venise a rejeté la demande du requérant par
arrêt du 15 juillet 1992, déposé au greffe le 10 août 1992 et notifié
au requérant le 14 décembre 1992.
GRIEFS
Le requérant se plaint de la durée de la procédure civile et
allègue la violation de l'article 6 par. 1 de la Convention. Il fait
état des longues années d'attente qu'il a vécues, torturé par l'idée
de mourir avant de connaître l'issue de son cas. Il fait également
état de sa mauvaise santé.
PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION
La requête a été introduite le 26 juillet 1991 et enregistrée le
18 décembre 1991.
Le 13 mai 1992, la Commission a décidé de porter la requête à la
connaissance du Gouvernement italien, en l'invitant à présenter par
écrit ses observations sur la recevabilité et le bien-fondé.
Le Gouvernement a présenté ses observations le 20 juillet 1992
et le requérant y a répondu le 8 octobre 1992.
EN DROIT
Le requérant se plaint de la durée de la procédure civile et
invoque à cet égard l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention.
Le Gouvernement affirme que la durée de la procédure litigieuse
peut s'expliquer en partie par le comportement du requérant et en
partie par la surcharge du rôle des juges chargés de l'affaire.
La Commission constate que la procédure litigieuse a commencé par
citation notifiée le 5 juin 1979, par laquelle le requérant assigna la
ministère de l'Intérieur devant le tribunal de Trieste. Suite à la
cassation de l'arrêt de la cour d'appel de Trieste du 19 mars 1982 par
la Cour de cassation, le 12 juin 1987, et au renvoi de l'affaire devant
la cour d'appel de Venise, le 15 juillet 1992 cette dernière a rejeté
la demande du requérant par arrêt déposé au greffe le 10 août 1992 et
notifié au requérant le 14 décembre 1992. La procédure litigieuse a
duré donc treize ans et six mois environ.
Selon la jurisprudence constante de la Cour et de la Commission,
le caractère raisonnable de la durée d'une procédure relevant de
l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention s'apprécie suivant les
circonstances de la cause et eu égard en particulier aux critères
suivants : la complexité de l'affaire, le comportement des parties et
celui des autorités compétentes.
Faisant application de ces critères et tenant compte des
circonstances propres à la présente affaire, la Commission estime que
le grief tiré par le requérant de la violation de l'article 6 par. 1
(art. 6-1) de la Convention soulève des problèmes de droit et de fait
suffisamment complexes pour que leur solution doive relever d'un examen
au fond.
Par ces motifs, la Commission, à l'unanimité,
DECLARE LA REQUETE RECEVABLE, tous moyens de fond réservés.
Le Secrétaire de la Le Président de la
Deuxième Chambre Deuxième Chambre
(K. ROGGE) (S. TRECHSEL)