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Text rozhodnutí
Datum rozhodnutí
31.3.1992
Rozhodovací formace
Významnost
3
Číslo stížnosti / sp. zn.

Rozhodnutí



SUR LA RECEVABILITE

de la requête No 12953/87

présentée par R.C.

contre l'Italie

__________

La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en

chambre du conseil le 31 mars 1992 en présence de

MM. C.A. NØRGAARD, Président

J.A. FROWEIN

S. TRECHSEL

G. SPERDUTI

E. BUSUTTIL

G. JÖRUNDSSON

A.S. GÖZÜBÜYÜK

A. WEITZEL

J.C. SOYER

H.G. SCHERMERS

H. DANELIUS

Mme G.H. THUNE

MM. F. MARTINEZ

C.L. ROZAKIS

Mme J. LIDDY

MM. L. LOUCAIDES

J.C. GEUS

A.V. ALMEIDA RIBEIRO

M.P. PELLONPÄÄ

B. MARXER

M. H.C. KRÜGER, Secrétaire de la Commission ;

Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de

l'Homme et des Libertés fondamentales ;

Vu la requête introduite le 24 juin 1986 par R.C. contre l'Italie

et enregistrée le 25 mai 1987 sous le No de dossier

N° 12953/87 ;

Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la

Commission ;

Après avoir délibéré,

Rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant Roberto Cossa, est un ressortissant italien, né en

1947 à Beinasco (Italie).

Pour la procédure devant la Commission, il est représenté par

Me Alberto Alessandri, avocat à Milan et Me Francesca Pedrazzi, avocat

stagiaire à Milan.

Les faits, tels qu'ils ont été exposés par les parties sont les

suivants.

Le requérant a fait l'objet à ce jour de 21 condamnations pour

lesquelles, aux termes de la mesure de cumul de peines adoptée par le

parquet de Venise le 20 février 1987, il doit expier une peine totale

de neuf ans, neuf mois et dix-sept jours de prison et de deux années

de régime de semi-liberté.

Le requérant qui purgeait sa peine depuis le 29 mars 1980, s'est

soustrait à l'exécution de sa peine le 30 janvier 1985, alors qu'il se

trouvait en régime de semi-liberté. Il fut arrêté de nouveau le

27 février 1986.

Les procédures objet de la requête sont au nombre de trois.

La première procédure concerne des poursuites pour escroquerie

et usage de chèques volés, pour des faits commis à Chioggia le

24 juillet 1974.

Le requérant aurait payé au moyen d'un chèque volé à la Société

Nordauto de Vérone, des achats d'un montant de 938 000 lires effectués

auprès d'une bijouterie de Chioggia.

Par jugement du tribunal de Venise du 21 janvier 1980, déposé au

greffe le 5 février 1980, le requérant fut condamné à huit mois de

prison et 80.000 lires d'amende. Le jugement fut rendu par contumace

du requérant, qui avait été régulièrement cité, mais n'avait pas

comparu à l'audience.

Le requérant interjeta appel du jugement. L'audience devant la

cour d'appel de Venise eut lieu le 25 octobre 1980, en présence du

requérant. Le même jour, la cour d'appel confirma le jugement rendu

en première instance. Le requérant se pourvut en cassation le 28

octobre 1980. Par arrêt du 6 mai 1983, la Cour de cassation infirma

l'arrêt en ce qui concernait la condamnation pour escroquerie car

l'infraction était amnistiée et réduisit en conséquence la peine

infligée au requérant de 15 jours d'emprisonnement et de 10 000 lires

d'amende. Elle confirma pour le reste l'arrêt de la cour d'appel.

L'annotation concernant le rejet du pourvoi fut portée sur le jugement

déposé au greffe le 24 novembre 1984.

Le mandat d'arrêt (n° 331/84) consécutif à cette condamnation fut

notifié au requérant, alors qu'il se trouvait en prison, le 7 mars

1986.

Le 8 mars 1986, le requérant souleva un incident d'exécution

(article 628 du Code de Procédure pénale ancien - C.P.P.) de ce mandat

d'arrêt et présenta un "appel tardif" contre le jugement du tribunal

de Venise. Il présenta le 28 avril 1986 les motifs à l'appui de ces

recours. Le requérant faisait valoir qu'il avait été condamné par

contumace aux termes d'une procédure qui n'était pas contradictoire et

au cours de laquelle il n'avait pu pleinement exercer les droits de la

défense.

Le tribunal de Venise fixa tout d'abord pour l'examen de ce

recours l'audience en chambre du conseil du 12 mai 1986, puis celle du

16 septembre 1986. Par ailleurs, le requérant ayant refusé de

comparaître à cette audience, il fut entendu, en prison, à sa demande,

par un magistrat, le 7 juin 1986.

Par ordonnance du 16 septembre 1986, déposée au greffe le

25 septembre 1986, le tribunal de Venise rejeta l'appel tardif, après

avoir relevé que le requérant avait personnellement participé à la

procédure d'appel et s'était pourvu en cassation, de sorte qu'aucune

voie de recours ne lui était plus ouverte.

Elle constata par ailleurs qu'aucune nullité, notamment en ce qui

concerne les notifications, n'entachait le titre d'exécution et rejeta

l'incident d'exécution.

Le requérant déclara se pourvoir en cassation. Il allègue que

n'ayant trouvé aucun avocat disposé à présenter des motifs à l'appui

de son pourvoi, il ne put présenter de motifs et en conséquence son

pourvoi fut déclaré irrecevable.

La seconde procédure objet de la requête concerne des poursuites

pour recel de chèques volés, faux et usage de faux et escroquerie, pour

les faits suivants.

Le requérant et un complice auraient détenu deux carnets de

chèques appartenant à R.P. et C.F. et auraient utilisé les formules de

chèque pour effectuer le paiement de marchandises et de services ou

pour obtenir de l'argent liquide en falsifiant la signature des

chèques. Ils auraient notamment falsifié un chèque d'un montant de

3 millions de lires. Les faits auraient été commis aux mois d'août

1979 à mars 1980 en diverses localités.

Le requérant fut interrogé quant à ces faits par le juge

d'instruction près le tribunal de Venise, à une date qui n'a pas été

précisée.

Le 5 juin 1984, il fut renvoyé en jugement devant le tribunal de

Venise.

Le 16 novembre 1984, le requérant qui se trouvait en régime de

semi-liberté reçut, en mains propres, la notification de la citation

à comparaître (datée du 3 novembre 1984) à l'audience du 21 février

1985 du tribunal de Venise. La citation fut notifiée également

le 30 novembre 1984, dans le lieu où il était détenu en régime de semi-

liberté, "aux mains du brigadier M. V. qui se charge de la remise de

la citation, le requérant étant en régime de semi-liberté."

Cependant le requérant ne se présenta pas à l'audience. Il fut alors

déclaré contumax. Un avocat d'office lui fut désigné. Il conclut à

ce que le requérant soit relaxé des délits de faux et d'escroquerie

puisqu'aucune plainte n'avait été déposée à cet égard par les victimes

et à l'application de la peine minimale prévue pour le délit de recel.

A l'issue du procès de première instance, le requérant fut

condamné pour les faits qui lui étaient reprochés à deux ans et six

mois d'emprisonnement et à quatre cent mille lires d'amende. Le

jugement du 21 février 1985 fut déposé au greffe du tribunal le

18 mars 1985.

Le 12 mars 1985, le parquet fit appel du jugement, puis le

8 mai 1985, il renonça à poursuivre l'appel qui fut déclaré irrecevable

le 14 juin 1985 par application de l'article 207 du C.P.P. ancien. La

notification du jugement se fit, conformément aux règles prévues en ce

qui concerne un accusé contumax, par l'article 500 du C.P.P.

Le mandat d'arrêt (n° 168/85), consécutif à cette condamnation

fut notifié au requérant, alors qu'il se trouvait en prison, le 7 mars

1986.

Le 8 mars 1986 le requérant souleva un incident d'exécution

(article 628 du C.P.P. ancien) contre ce mandat d'arrêt et présenta un

"appel tardif" contre le jugement dont il avait eu connaissance le 7

mars 1986. Le requérant faisait valoir qu'il avait été condamné par

contumace au terme d'une procédure qui n'était pas contradictoire et

au cours de laquelle il n'avait pu pleinement exercer les droits de la

défense.

Le recours du requérant fut rejeté par ordonnance du 16 septembre

1986 du tribunal de Venise, statuant en chambre du conseil, après que

celui-ci eut constaté que l'extrait de l'arrêt avait été notifié au

requérant dans le respect des règles prévues par les dispositions en

vigueur. En effet le requérant qui bénéficiait du régime de semi-

liberté, n'avait pas fait retour à son lieu de détention (casa di

lavoro) à Venise, le 30 janvier 1985, et s'était rendu introuvable

jusqu'au 27 février 1986, date de son arrestation. Si bien que l'arrêt

avait été rendu selon les formes appropriées et les notifications

étaient régulières. Il n'y avait donc aucune possibilité d'interjeter

un appel tardif ni de soulever un incident d'exécution.

Dans le cadre d'une troisième procédure (n° 267/85) le requérant

fut accusé de recel de chèques volés, de faux et d'escroquerie pour

utilisation de chèques volés.

Le requérant aurait payé au moyen de deux chèques volés à E.C.

et P.Z. respectivement, des achats de quincaillerie et aurait utilisé

deux autres chèques volés pour régler des achats et se procurer de

l'argent comptant pour un total de 222 000 lires.

Le requérant fut entendu à deux reprises au cours de

l'instruction, à des dates qui n'ont pas été précisées.

Le requérant, qui au cours de l'instruction était tout d'abord

détenu pour d'autres faits puis se trouvait en régime de semi-liberté,

mais s'était soustrait à la justice depuis le 30 janvier 1985, fut

renvoyé en jugement par décision du 14 février 1985 du juge

d'instruction de Venise.

L'audience devant le tribunal de Venise fut fixée au

2 octobre 1985.

Le requérant qui n'était pas présent fut déclaré contumax et la

procédure se poursuivit en présence de l'avocat désigné d'office. A

l'issue de l'audience, le requérant fut condamné à deux ans et deux

mois d'emprisonnement et à un million de lires d'amende.

Le jugement fut déposé au greffe du tribunal le 28 octobre 1985

et notifié, selon la procédure prévue par l'article 173 du C.P.P., au

requérant par dépôt de l'arrêt au greffe le 13 février 1986 et à son

défenseur, désigné d'office, par extrait, le 7 mai 1986.

Le mandat d'arrêt (n° 203/86) consécutif à cette condamnation,

daté du 31 juillet 1986, fut notifié au requérant le 22 août 1986.

Le 23 août 1986, le requérant interjeta un appel tardif contre

ce jugement et souleva un incident d'exécution contre son mandat

d'arrêt. Dans les motifs exposés le 1er septembre 1986 à l'appui de

son recours, il faisait valoir notamment que le mandat d'arrêt lui

avait été notifié à une adresse qui avait été la sienne mais qui était

erronée quant au n° de la rue et à laquelle de toute manière il

n'habitait plus car depuis 1985 il avait transféré son domicile à une

autre adresse ainsi qu'il ressortait de la pièce d'identité qui lui

avait été délivrée le 6 décembre 1985 par la mairie où il avait fixé

sa nouvelle résidence.

Il se plaignait également d'une violation de l'article 6 par. 1

qui consacre le droit d'un accusé d'être présent à l'audience en se

référant à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de

l'homme dans l'affaire Colozza.

La date d'examen du recours fut fixée par le tribunal de Venise

au 16 septembre 1986.

Le recours fut rejeté le 16 septembre 1986 par décision du

tribunal de Venise rendue en chambre du Conseil. Le tribunal, après

avoir constaté que le requérant s'était soustrait à la justice du

30 janvier 1985 au 27 février 1986, estima que les notifications qui

avaient été faites conformément à l'article 173 du C.P.P. étaient

régulières. Ainsi le jugement du 2 octobre 1985 était passé en force

de chose jugée et aucune possibilité de recours n'était ouverte au

requérant.

Cette décision fut déposée au greffe le 25 septembre 1986 et

notifiée au requérant le 29 septembre 1986.

Le requérant se pourvut en cassation. Il allègue toutefois que,

ne disposant pas de moyens suffisants pour rémunérer un défenseur qui

rédige les motifs de son pourvoi en cassation, il ne put présenter ses

motifs à l'appui du pourvoi qui fut déclaré irrecevable par le tribunal

de Venise le 19 décembre 1986. La décision fut notifiée au requérant

le 5 janvier 1987.

GRIEFS

Devant la Commission, le requérant se plaint d'abord d'avoir fait

l'objet de plusieurs condamnations pour les mêmes faits, à savoir le

recel et l'usage frauduleux de chèques volés à la Société X. Il estime

que le principe "ne bis in idem" a été méconnu à son encontre.

Il se plaint ensuite d'avoir été jugé par défaut ce qui lui

aurait enlevé la possibilité d'exercer, de façon effective, le droit

de se défendre. Il allègue la violation de l'article 6 de la

Convention.

PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION

La requête a été introduite le 24 juin 1986 et enregistrée le

25 mai 1987.

Le 8 novembre 1989, la Commission a décidé de porter la requête

à la connaissance du Gouvernement italien et de l'inviter à présenter

ses observations sur la recevabilité et le bien-fondé du grief tiré par

le requérant de la violation du droit à un procès équitable en relation

aux condamnations prononcées à son encontre, par contumace, les

21 février et 2 octobre 1985.

Le Gouvernement italien a fait parvenir ses observations le

19 février 1990.

Le requérant a fait parvenir ses observations en réponse le

1er octobre 1990.

Le 12 octobre 1990, la Commission a décidé d'accorder

l'assistance judiciaire au requérant.

EN DROIT

1. Le requérant se plaint d'avoir fait l'objet de plusieurs

condamnations pour les mêmes faits, à savoir le recel et l'usage

frauduleux de chèques volés à la Société X. Il estime que le principe

du "ne bis in idem" a été méconnu à son encontre.

Pour la Commission le grief du requérant doit être examiné à la

lumière du Protocole n° 7 à la Convention qui dispose à son article 4

(P7-4) que :

"1. Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les

juridictions du même Etat en raison d'une infraction pour

laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement

définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de

cet Etat."

Elle relève cependant que ce Protocole n'a pas été ratifié par

l'Italie.

En conséquence la Commission n'est pas compétente, pour examiner

le grief tiré par le requérant d'une prétendue violation de cette

disposition par l'Italie.

Il s'ensuit que ce grief est incompatible ratione personae avec

les dispositions de la Convention et doit être rejeté conformément à

l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.

2. Le requérant se plaint d'avoir été jugé par contumace. Il en

infère une violation du droit à un procès équitable et des droits de

la défense, tels que garantis par l'article 6 (art. 6) de la

Convention.

Les griefs du requérant visent les condamnations prononcées

respectivement les 21 janvier 1980, 21 février 1985 et 2 octobre 1985

par le tribunal de Venise.

Quant à la condamnation prononcée par le tribunal de Venise le

21 janvier 1980.

La Commission note que la condamnation prononcée par contumace

du requérant, fut confirmée en appel - en la présence du requérant qui

admit d'ailleurs les faits - et est passée en force de chose jugée

suite à l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 6 mai 1983, déposé

au greffe de la Cour à une date qui n'a pas été précisée mais qui est

antérieure au 24 novembre 1984, date à laquelle les annotations

pertinentes furent portées par le greffe du tribunal de Venise en marge

du jugement rendu par le tribunal.

La Commission relève également que le requérant n'a pas allégué

n'avoir pas eu connaissance en temps voulu de cet arrêt. Par ailleurs

il ne ressort pas du dossier que des circonstances particulières aient

pu empêcher le requérant d'être informé en temps voulu de l'issue de

son pourvoi. Or le requérant a soumis sa requête à la Commission le

24 juin 1986, soit au-delà du délai de six mois prévu par l'article 26

(art. 26) de la Convention.

Il s'ensuit que sa requête, quant à cette procédure, est tardive

et doit être rejetée, conformément à l'article 27 par. 3 (art. 27-3)

de la Convention.

Quant à la condamnation prononcée par le tribunal de Venise le

21 février 1985.

Le Gouvernement souligne que la citation à comparaître à

l'audience de jugement du 21 février 1985 fut notifiée en mains propres

au requérant les 16 novembre 1984 à son domicile et à nouveau

le 30 novembre 1984, dans le lieu où il était détenu en régime de semi-

liberté, "aux mains du brigadier M. V. qui se charge de la remise de

la citation, le requérant étant en régime de semi-liberté."

Le requérant ne se présenta pas à l'audience et fut déclaré

contumax. Un avocat fut désigné d'office pour sa défense.

Le jugement du 21 février 1985 fut notifié sans succès au

requérant.

Le procureur général interjeta appel du jugement. L'appel ne put

être notifié à l'accusé pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-

dessus. L'appel fut cependant notifié au défenseur désigné d'office.

Le 8 mai 1985 le procureur général déclara renoncer à son appel.

Le jugement passa en force de chose jugée.

A la lumière des faits ci-dessus, le Gouvernement considère que

le requérant qui avait pleine et entière connaissance des poursuites

dont il faisait l'objet, a volontairement renoncé à comparaître à

l'audience et qu'il ne saurait se plaindre d'une violation de son droit

à un procès équitable.

Le requérant ne conteste pas vraiment avoir eu connaissance des

poursuites. Il considère néanmoins que sa condamnation par contumace,

à l'issue d'une audience au cours de laquelle il était représenté par

un défenseur désigné d'office, constitue une violation de son droit à

un procès équitable et à une défense effective garantis par l'article

6 (art. 6) de la Convention. Il affirme que son absence à l'audience

ne peut s'analyser comme une renonciation totale et absolue à une

défense effective.

Enfin le requérant soutient que ni la notification du jugement

ni celle des actes de procédure successifs n'ont été faits conformément

à la loi. Il affirme en effet avoir résidé à son domicile élu pendant

toute l'année 1985 et avoir d'ailleurs demandé en novembre 1985 sa

carte d'identité dans la commune de sa résidence et l'avoir obtenue

le 6 décembre 1985.

Pour la Commission il ressort du dossier que le requérant était

au courant des poursuites dont il faisait l'objet puisqu'il avait été

interrogé sur les faits qui lui étaient reprochés. Le requérant avait

par ailleurs été dûment informé de la date prévue pour son jugement

puisqu'il avait été régulièrement cité à comparaître et avait reçu

personnellement la citation qui lui avait été adressée.

Elle relève de surcroît que le requérant bénéficiait d'un régime

de semi-liberté et que de ce fait aucun obstacle ne pouvait l'empêcher

d'assister lui-même à l'audience ou de prendre toute disposition utile

en vue d'assurer sa défense à l'audience.

Dès lors que le requérant, qui a été mis en condition d'exercer

pleinement son droit de participer à l'audience et de nommer un

défenseur de son choix pour assurer sa défense, n'a pas jugé utile de

se prévaloir de ses droits, la Commission considère qu'il ne saurait

se plaindre d'une violation de l'article 6 (art. 6) de la Convention

(voir à cet égard requête n° 10889/84 c/Italie, décision du 11 mai 1988

non publiée).

Il s'ensuit que ce grief est manifestement mal fondé et doit être

rejeté conformément à l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.

Quant à la condamnation prononcée le 2 octobre 1985.

Le Gouvernement a excipé du non-épuisement par le requérant des

voies de recours internes du fait que ce dernier n'a pas persévéré dans

son pourvoi en cassation contre la décision du tribunal de Venise du

2 octobre 1985.

Il indique à cet égard que le requérant aurait pu présenter les

motifs à l'appui de son pourvoi lui-même, en même temps qu'il a déclaré

se pourvoir en cassation ou bien dans les délais prévus par la loi pour

le faire.

Le requérant fait valoir qu'il ne pouvait rémunérer un défenseur,

compte tenu de l'insuffisance de ses moyens financiers, et qu'il n'a

pu bénéficier de l'aide technique d'un défenseur lui permettant de

présenter des motifs à l'appui de son pourvoi, si bien que son pourvoi

a été déclaré irrecevable. Dans ces circonstances, il devrait être

considéré comme étant relevé de l'obligation d'épuiser cette voie de

recours.

Par ailleurs le requérant, s'appuyant sur la jurisprudence de la

Cour et de la Commission, soutient que ni l'appel tardif ni l'incident

d'exécution ne sont des voies de recours efficaces qu'il aurait dû

épuiser avant de s'adresser à la Commission. Il cite à cet égard

l'arrêt Colozza (Cour eur. D.H., arrêt du 12 février 1985, Série A

n° 89 page 16, par. 31).

La Commission rappelle que l'article 26 (art. 26) de la

Convention n'exige l'épuisement que des recours accessibles, adéquats

et relatifs aux violations incriminées (cf. arrêt Ciulla du 22 février

198, Série A n° 148, p. 15, par. 31).

La Cour a jugé que la voie de l'appel "apparemment tardif" qui

ressortait d'une interprétation jurisprudentielle des dispositions en

vigueur, "n'était pas apte à remédier aux violations de l'article 6

par. 1 (art. 6-1) de la Convention, dans le cas d'un accusé jugé par

contumace. En effet, la juridiction de recours aurait dû le déclarer

recevable avant de pouvoir réexaminer la condamnation". Par ailleurs,

rien ne prouve qu'un tel recours eut été efficace dans le cas du

requérant (cf. Cour eur. D.H., arrêt Brozicek du 19 décembre 1989, page

16 par. 32 et 33).

Rien dans les observations du Gouvernement ne permet à la

Commission de revenir sur la jurisprudence ainsi exposée. Il s'ensuit

que l'exception de non-épuisement des voies de recours internés doit

être rejetée.

Le Gouvernement fait valoir que la citation en jugement à

l'audience du 2 octobre 1985 fut notifiée au requérant conformément à

la procédure prévue à l'article 173 du C.P.P. puisque ce dernier était

introuvable.

Un défenseur fut désigné d'office le 15 avril 1985 par le

Président du tribunal de Venise.

Le Gouvernement soutient cependant que le requérant, qui pendant

toute la durée de l'instruction était détenu, avait été informé de

l'ouverture des poursuites, des charges qui pesaient contre lui et du

fait que la fixation de la date de l'audience devait avoir lieu

incessamment.

Par ailleurs, le Gouvernement indique que les tentatives répétées

de notifier les actes de procédure au requérant à son domicile ou à son

lieu de détention se sont conclues par un échec malgré l'enquête

ultérieure ordonnée par le président du tribunal de Venise le 16 avril

1985.

Le Gouvernement considère donc que le requérant qui était au

courant des poursuites dont il faisait l'objet a clairement renoncé à

comparaître devant ses juges et que ses griefs sont manifestement mal

fondés.

Le requérant remarque que les affirmations du Gouvernement

italien selon lesquelles il aurait eu connaissance de la date de

l'audience ne reposent sur aucune preuve ou commencement de preuve.

Les éléments du dossier montrent au contraire qu'il ignorait totalement

quelle était la date fixée pour l'audience puisque la citation lui

avait été notifiée selon la procédure prévue par l'article 173 du

C.P.P. pour les personnes "introuvables". On ne saurait donc affirmer,

comme le fait le Gouvernement italien, qu'il a entendu renoncer à

comparaître.

Le requérant soutient en second lieu qu'aucune tentative sérieuse

de notification ne fut faite par les autorités : il ressort des pièces

fournies par le Gouvernement que la première notification fut faite à

une adresse erronée. Par ailleurs, au cours de l'année 1985, il

demeurait à son domicile de Iesolo, en novembre 1985 il avait fait une

demande de carte d'identité à la Commune et avait obtenu sa carte le

6 décembre 1985. Enfin, une personne de sa famille avait toujours été

présente au domicile en question.

Dans ces circonstances il y a lieu de conclure qu'il n'a pas été

"informé" au sens de l'article 6 par. 3 (a) (art. 6-3-a) de la

Convention et n'a pu exercer son droit d'être présent à l'audience et

de disposer d'une défense effective.

Le requérant souligne par ailleurs que le fait qu'il se soit

soustrait à la justice ne constitue pas un élément de nature à le

priver des droits garantis par l'article 6 (art. 6).

La Commission relève que la question de savoir si dans les

circonstances de l'espèce il y a eu violation du droit du requérant

à un procès équitable tel qu'il est garanti par l'article 6 par. 1

et 3 (art. 6-1, 6-3) de la Convention, pose de sérieuses questions de

fait et de droit qui ne peuvent être résolues à ce stade de la

procédure car elles nécessitent un examen approfondi qui relève du fond

de l'affaire.

La Commission constate par ailleurs que le grief ne se heurte à

aucun autre motif d'irrecevabilité.

Par ces motifs, la Commission statuant à la majorité

DECLARE LA REQUETE RECEVABLE quant aux griefs tirés par le

requérant d'une violation des articles 6 par. 1 et 3 (art. 6-1, 6-3)

de la Convention en ce qu'ils visent la condamnation prononcée le 2

octobre 1985 par le tribunal de Venise,

DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE POUR LE SURPLUS

Le Secrétaire Le Président

de la Commission de la Commission

(H.C. KRÜGER) (C.A. NØRGAARD)