Přehled
Rozhodnutí
Première Chambre
SUR LA RECEVABILITE
de la requête No 13036/87
présentée par Luigi GARZONE
contre l'Italie
__________
La Commission européenne des Droits de l'Homme (Première
Chambre) siégeant en chambre du conseil le 10 septembre 1991
en présence de
MM. J.A. FROWEIN, Président de la Première Chambre
G. SPERDUTI
J.-C. SOYER
H. DANELIUS
Sir Basil HALL
MM. C.L. ROZAKIS
L. LOUCAÏDES
A.V. D'ALMEIDA RIBEIRO
M. M. de SALVIA, Secrétaire de la Première Chambre ;
Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de
l'Homme et des Libertés fondamentales ;
Vu la requête introduite le 29 avril 1987 par Luigi GARZONE
contre l'Italie et enregistrée le 24 juin 1987 sous le No de
dossier 13036/87 ;
Vu les observations présentées par le Gouvernement défendeur
les 30 novembre 1989 et 17 janvier 1990 et les observations en réponse
présentées par le requérant le 14 mars 1990 ;
Vu la décision de la Commission du 9 avril 1991 de renvoyer la
requête à la Première Chambre ;
Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de
la Commission ;
Après avoir délibéré,
Rend la décision suivante :
EN FAIT
Le requérant, Luigi Garzone, est un ressortissant italien né
en 1916, résidant à Rome.
Devant la Commission, il est représenté par Maître
Beniamino D'Aloisio, avocat au barreau de Rome.
Les faits, tels qu'ils ont été exposés par les parties,
peuvent se résumer comme suit.
Par acte notifié le 17 juin 1977, le requérant assigna la
société anonyme "Alitalia", son employeur, devant le juge d'instance
("pretore") de Rome. Il demanda la reconnaissance de son droit à un
reclassement à compter du 1er janvier 1966, ainsi que la condamnation
de la société à lui verser les différences de rétributions
correspondantes.
L'affaire fut mise en délibéré à l'audience du 20 juin 1978
et, le jour même, le juge d'instance fit droit à la demande du
requérant. Le texte du jugement fut déposé au greffe le
21 juillet 1978.
Le 19 juillet 1979, la société Alitalia interjeta appel.
L'affaire fut mise en délibéré à l'audience du
1er février 1980 et, le jour même, le tribunal de Rome réforma
partiellement la décision attaquée, constatant que le requérant
n'avait droit au reclassement demandé qu'à partir de novembre 1967.
Le texte de son jugement fut déposé au greffe le 25 mars 1980.
Le 14 juin 1980, le requérant se pourvut en cassation. Par
arrêt du 21 juin 1983, la Cour de cassation cassa la décision du
tribunal de Rome et désigna le tribunal de Civitavecchia en tant que
juridiction de renvoi. Le texte de cet arrêt fut déposé au greffe le
6 janvier 1984.
Par acte notifié le 21 janvier 1985, le requérant assigna la
société Alitalia devant le tribunal de Civitavecchia.
Quatre audiences (7 juin 1985, 6 juin 1986, 7 novembre 1986 et
6 mars 1987) furent renvoyées au motif que le dossier de la procédure
devant le juge d'instance de Rome n'avait pas été transmis au
tribunal.
Le 5 février 1988, le représentant du requérant déposa les
copies des procès-verbaux de première instance.
Le 6 mai 1988, l'affaire fut mise en délibéré. Par décision
du jour même, le tribunal constata le droit du requérant à un premier
reclassement à compter du 1er janvier 1966 et à un deuxième
reclassement à compter du 1er août 1967. Il condamna par conséquent
la société Alitalia au paiement des différences de rétributions
correspondantes.
Le texte de ce jugement fut déposé au greffe le
1er décembre 1988.
Le 23 janvier 1989, les parties parvinrent à un règlement
amiable de l'affaire devant le juge d'instance de Rome.
GRIEFS
Le requérant se plaint de la durée de la procédure et allègue
la violation de l'article 6 par. 1 de la Convention.
PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION
La présente requête a été introduite le 29 avril 1987 et
enregistrée le 24 juin 1987.
Le 10 mars 1988, la Commission a décidé de porter cette
requête à la connaissance du Gouvernement défendeur mais sans
l'inviter à lui présenter, à ce stade, des observations.
Le 6 juillet 1989, la Commission a décidé d'inviter le
Gouvernement défendeur à lui pésenter par écrit ses observations sur
la recevabilité et le bien-fondé de la requête.
Le Gouvernement a présenté ses observations les
30 novembre 1989 et 17 janvier 1990. Le requérant y a répondu le
14 mars 1990.
Le 9 avril 1991, la Commission a décidé de renvoyer la
requête à la Première Chambre.
Le 27 mars 1991, le requérant a été invité à présenter des
renseignements complémentaires concernant l'état de la procédure, qui
sont parvenus à la Commission le 23 avril 1991. Le Gouvernement,
auquel ces renseignements ont été transmis le 31 mai 1991, n'a
formulé aucun commentaire.
EN DROIT
Le requérant se plaint de la durée de la procédure en question
et invoque les dispositions de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la
Convention qui garantit à toute personne le droit "à ce que sa cause
soit entendue <...> dans un délai raisonnable".
La Commission constate que la procédure avait pour objet le
droit du requérant à un reclassement et aux différences de
rétributions correspondantes.
En ce qui concerne la période à prendre en considération, la
Commission relève que l'assignation devant le juge d'instance de
Rome, qui marque le début de la procédure, date du 17 juin 1977.
Le 23 janvier 1989, les parties sont parvenues à un règlement
amiable du litige.
La procédure litigieuse a donc duré onze ans et un peu plus de
sept mois.
Selon le requérant, ce laps de temps ne saurait passer pour
"raisonnable" au sens de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la
Convention. Le Gouvernement combat cette thèse.
Selon la jurisprudence constante de la Cour et de la
Commission, le caractère raisonnable de la durée d'une procédure
relevant de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention s'apprécie
suivant les circonstances de la cause et eu égard en particulier aux
critères suivants : la complexité de l'affaire, le comportement du
requérant et celui des autorités compétentes (voir par exemple Cour
Eur. D.H. arrêt Vernillo du 20 février 1991, série A n° 198, à
paraître, par. 30).
Faisant application de ces critères et tenant compte des
circonstances propres à la présente affaire, la Commission estime que
la durée de la procédure litigieuse soulève des problèmes complexes de
droit et de fait sous l'angle de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la
Convention.
En conséquence, elle ne saurait déclarer la requête
manifestement mal fondée et estime que celle-ci nécessite un examen
qui relève du fond de l'affaire. Elle constate d'autre part que la
requête ne se heurte à aucun autre motif d'irrecevabilité.
Par ces motifs, la Commission, à l'unanimité,
DECLARE LA REQUETE RECEVABLE, tous moyens de fond réservés.
Le Secrétaire de la Le Président
Première Chambre de la Première Chambre
(M. de SALVIA) (J.A. FROWEIN)